Correspondance de Voltaire/1764/Lettre 5698

Correspondance : année 1764GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 43 (p. 261-262).

5698. — À M.  GOLDONI.
Ferney, 30 juin.

Mon cher favori de la nature, je suis toujours réduit à dicter. Je suis bien vieux ; je perds la santé et la vue. Ne soyez point étonné d’avoir si rarement de mes nouvelles. Je vous ai présenté un Corneille, parce que celui qui fait honneur à l’Italie doit avoir les ouvrages de l’auteur qui fait honneur à la France. C’est précisément par cette raison-là que je ne vous ai pas envoyé mes ouvrages. Une autre raison encore, c’est qu’il n’y en a à Paris que de détestables éditions. Si jamais vous venez à Ferney ou aux Délices, j’espère vous en présenter une moins incorrecte. J’attends les ouvrages dont vous voulez bien me flatter ; ils me consoleront des miens.

Vivez gaiement à Paris, mon cher ami ; ayez autant de plaisir que vous en donnez, et aimez toujours un peu un vieux solitaire qui vous est tendrement attaché jusqu’au dernier moment de sa vie.