Correspondance de Voltaire/1764/Lettre 5688


5688. — DE MADAME LA MARGRAVE DE BADE-DOURLACH.
À Carlsruhe, le 26 juin.

Monsieur, le peu de moments que je vis, M. Mallet, joint au titre d’être de vos amis, me fit bien désirer de le voir repasser chez nous, et prendre ma réponse. Je m’en flattais même si bien, que je la remis à ce moment, mais le sachant maintenant de retour à Genève, je ne perds plus un instant à vous remercier de la lettre du monde la plus flatteuse et la plus obligeante qu’il vous a plu m’écrire[1]. Vous connaissez trop, monsieur, mon estime et mon admiration pour vous, pour ne point être persuadé que tous mes vœux ne tendent qu’à vous revoir, vous entendre, vous admirer, et vous prouver ma parfaite considération. Vous ne m’en dites plus rien, monsieur ; voulez-vous que j’en perde toute espérance ? j’en serais vivement touchée. Quelle satisfaction au moins pour moi de vous voir me conserver votre souvenir ! c’est un dédommagement auquel j’ai quelque droit de prétendre par tout le cas que j’en fais. M. Mallet m’a remis, monsieur, vos deux derniers ouvrages ; il ne pouvait me donner rien de plus agréable. Vos Contes de Guillaume Vadé font bien preuve du feu et de la vivacité intarissable de votre génie. Enfin il n’est qu’un Voltaire ; j’en suis si persuadée que rien n’égalera jamais les sentiments de l’estime la plus distinguée avec laquelle j’ai l’honneur d’être, monsieur, votre, etc.


Caroline, margrave de Bade-Dourlach.

  1. C’est la lettre 5605.