Correspondance de Voltaire/1764/Lettre 5557

Correspondance : année 1764GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 43 (p. 121-122).

5557. — À M.  DAMILAVILLE.
8 février.

Bon ! tant mieux ! ils sont piqués : c’est ce que nous voulions, quand les mulets de ce pays-là ruent, c’est une preuve qu’ils ont senti les coups de fouet.

Mon cher frère doit avoir reçu Thélème, et je suis bien sur que Macare[1] est chez lui. J’ai été bien content des deux tomes de figures que j’ai reçus de Briasson ; je vois que l’Encyclopédie sera un des plus beaux monuments de la nation française, malgré certains petits polissons qui y ont mis la main, et d’infâmes polissons qui ont voulu nous priver d’un ouvrage si utile.

Mon cher frère, j’ai des nouvelles assez satisfaisantes sur la Tolérance. On souhaite d’abord que vous en donniez quelques exemplaires à des personnes qui les trompetteront dans le monde comme un ouvrage honnête, religieux, humain, utile, capable de faire du bien, et qui ne peut faire de mal, etc. Alors il aura son passe-port, et marchera la tête levée. Rendez donc, mon cher frère, ce service aux honnêtes gens. Que frère Thieriot, dont on n’a jamais de nouvelles, en fasse passer quelques-uns à M. de Crosne, à M. de Montigny-Trudaine[2], à M. le marquis de Ximenès. C’est une œuvre charitable que je recommande à votre piété.

Songez toujours que vous m’aviez promis les sottises de Crevier sur Montesquieu[3]. Je le payerai, sans faute, de toutes ses peines, dès que j’aurai son mémoire final.

On doit vous avoir envoyé une Seconde lettre du Quaker[4], qui est un sermon très-orthodoxe et très-charitable. Ces petits ouvrages font beaucoup de bien aux bonnes âmes, et nourrissent la dévotion.

Je ne sais rien de nouveau de votre pays, et dans le nôtre il n’y a que de la pluie. Ma santé est toujours bien mauvaise ; les fenêtres de la maison tombent[5] : les Fréron seront bien aises :


Exoriare aliquis nostris ex ossibus ultor !

(Virg., Æneid., lib. IV, v, 625.)


Il y a des gens qui font du bien dans les provinces ; faites-en à Paris, mon cher frère. Écr. l’inf…

  1. Voyez la lettre 5554.
  2. À qui est adressée une lettre du 8 décembre 1775.
  3. Voyez la note, page 106.
  4. Elle est tome XXV, page 141.
  5. Voyez le passage de l’Ecclésiaste cité tome XLII, page 438.