Correspondance de Voltaire/1761/Lettre 4578

Correspondance : année 1761
Garnier (Œuvres complètes de Voltaire, tome 41p. 328-329).

4578. — À M. DAMILAVILLE.
Le 19 juin.

En voyant la mine de ce pauvre abbé du Resnel[1] je n’ai pu m’empêcher de dire :


Quoiqu’il eût cette mine, il fit pourtant des vers ;
fut prêtre, mais philosophe ;
Philosophe pour lui, se cachant des pervers.
Que n’ai-je été de cette étoffe !


Frère Thieriot n’aura pas autre chose de moi. Il n’y a pas moyen de faire une inscription, à moins qu’elle ne soit un peu piquante, et je ne trouve rien de piquant à dire sur l’abbé du Resnel. C’était un homme aimable dans la société ; je le regrette de tout mon cœur, je le suivrai bientôt, et puis c’est tout.

J’ai pris la liberté d’envoyer sous votre enveloppe une lettre[2] pour M. Héron, dans laquelle je lui demande une grâce qui m’est très-nécessaire : c’est de vouloir bien me faire parvenir une ordonnance du roi qui défend aux archevêques et aux évêques de prendre des curés pour leurs promoteurs ou officiaux. Cette loi, qui est de 1627, me paraît fort sage : c’est ce qui fait qu’elle n’est point exécutée. Comme j’aime un peu le remue-ménage, j’ai envie de faire quelques niches aux prêtres de mon canton. Rien n’est plus amusant dans la vieillesse.

Je me recommande à tous les frères, en corps et en âme.

  1. Mort le 25 février 1761.
  2. Elle manque. (B.)