Correspondance de Voltaire/1759/Lettre 3825

Correspondance de Voltaire/1759
Correspondance : année 1759GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 40 (p. 75).

3825. — À M. BERTRAND.
10 avril.

Voici, mon cher ami, votre brevet de Lyonnais ; si vous voulez m’envoyer quatre lignes pour le secrétaire[1] éternel, tout sera dit.

On n’a pas pu avoir l’honneur de vous recevoir plus tôt, parce que l’Académie n’est ressuscitée que depuis peu[2] ; et vous êtes le premier qu’elle adopte.

Je serais très-surpris qu’il y eût un Boudon député des protestants auprès du roi. Il n’y a point de protestants en France, aux yeux de la cour ; il n’y a que des nouveaux convertis. On ne connaît pas plus de corps de protestants que de corps de Turcs. Si par hasard il y en a dans les provinces, on veut n’en rien savoir. Ni le clergé, ni la noblesse, ni le tiers état, ni les parlements, n’ont le droit d’avoir un député résident à la cour.

Il se peut faire que quelques négociants huguenots aient imaginé de prêter cinquante millions, et qu’ils aient envoyé Boudon pour cette affaire. Mais je vous garantis qu’ils ne trouveront pas les cinquante millions ; si je les avais, je ne les donnerais pas. Je souhaite que Boudon réussisse, mais j’en doute.

On dit que les jésuites ont fait révolter le Portugal contre le roi ; il le mérite bien, pour avoir demandé la permission au pape de punir des sujets tonsurés et parricides.

Mille tendres respects à M. et à Mme de Freudenreich.

La Saxe et le Portugal jouent un piètre rôle dans le meilleur des mondes possibles. V.

  1. L’abbé Pernetti.
  2. Deux sociétés ou corps littéraires existaient à Lyon, et furent réunis en 1758. Les lettres patentes avaient été enregistrées au parlement le 23 août 1758 ; mais la première séance publique ou installation n’eut lieu que le 5 décembre 1758. (B.)