Correspondance de Voltaire/1755/Lettre 2971

Correspondance de Voltaire/1755
Correspondance : année 1755GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 38 (p. 424-425).

2971. — À M. THIERIOT.
Aux Délices, le 4 août.

Ce que vous avez est presque aussi ancien que notre amitié. Il y a trente ans que cela est fait, et vous voyez combien cela est différent des plates grossièretés et des scandales odieux qui courent. Vous aurez le reste ; vous verrez que le bâtard de l’Arioste n’est pas le bâtard de l’Arétin, Un scélérat, nommé Grasset, est venu dans ce pays-ci, dépêché par des coquins de Paris, pour faire imprimer sous mon nom, à Lausanne, les abominations qu’ils ont fabriquées. Je l’ai fait guetter à Lausanne ; il est venu à Genève, je l’ai fait mettre en prison. J’ai ici quelques amis, et on n’y troublera point mon repos impunément.

Adieu, mon ancien ami ; vous auriez trouvé ma retraite charmante l’été, et l’hiver il ne faut pas quitter le coin de son feu. Tous les lieux sont égaux quand il gèle ; mais dans les beaux jours je ne connais rien qui approche de ma situation. Je ne connaissais ni ce nouveau plaisir, ni celui de semer, de planter, et de bâtir. Je vous aurais voulu dans ce petit coin de terre. J’y suis très-heureux ; et si les calomnies de Paris venaient m’y poursuivre je serais heureux ailleurs.

Je vous embrasse. Quid novi ?