Correspondance de Voltaire/1748/Lettre 1933

Correspondance de Voltaire/1748
Correspondance : année 1748GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 36 (p. 553).
1933. — À M. LE COMTE D’ARGENTAL.
16 décembre.

Enfin, je ris aux anges en recevant leur lettre. Vos conseils sont suivis, ou plutôt prévenus, et partout j’ai rendu raison de l’inaction forcée d’Assur.

Il me semble que le point dont il s’agit, c’est la clarté. On voit bien nettement qu’Assur est entré dans ce mausolée (fait en labyrinthe, selon l’usage des anciens) par une issue secrète ; et l’autre ange, M. Pont-de-Veyle, doit aimer cette idée-là. On voit par là pourquoi cet Assur n’est pas parvenu plus tôt à l’endroit du sacrifice. Ninias dit qu’il vient d’entendre quelqu’un qui précipitait ses pas derrière lui, dans ce tombeau autre degré de lumière. Azéma répond : C’est peut-être votre mère, qui a été assez hardie pour envoyer à votre secours dans cet asile inabordable et sacré. Ces mots préparent, ce me semble, la terreur, et fortifient le tragique de la catastrophe, loin de le diminuer, puisqu’il se trouve enfin que c’est la reine elle-même qui est venue au secours de son fils.

Assur est donc tout naturellement amené du tombeau sur la scène et Azéma, se jetant au devant du coup qu’Assur veut porter à Ninias, augmente la force de l’action et rend le jeu noble et naturel. Il est absolument nécessaire que cette action se passe sous les yeux et non en récit, et que Ninias commence à apprendre son malheur de la bouche même d’Assur. Si vous êtes contents, madame et messieurs, je le suis aussi, et je me mets à l’ombre de vos ailes.