Correspondance de Voltaire/1746/Lettre 1852

Correspondance de Voltaire/1746
Correspondance : année 1746GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 36 (p. 473-474).

1852. — À M. MOREAU,
avocat du roi au chatelet[1].
Paris, ce 13 décembre 1746,
rue Traversière.

Monsieur, j’ai l’honneur de vous envoyer un petit résumé d’un procès malheureux, mais nécessaire, et dont l’objet se trouve joint à l’utilité publique[2]. Nous demandons, M. l’abbé d’Olivet et moi, que le mémoire calomnieux de maître Rigoley soit lacéré.

Quant à la personne de Rigoley, monseigneur l’archevêque de Tours et messieurs les agents du clergé s’en rapportent à vous, monsieur, sur la satisfaction personnelle qu’il me doit, et ils ont promis de le chasser de son bureau[3] s’il n’obéit pas aux ordres que vous voudrez bien lui donner. Je vous supplie donc, monsieur, d’avoir la bonté de lui faire dire de venir vous parler. Je me rendrai chez vous à l’heure que vous aurez prescrite. J’apporterai les preuves par écrit qui démontrent toutes ses calomnies. Il n’aura point de moi d’autres reproches, et j’ose me flatter qu’il sera si confondu et peut-être si touché qu’il préviendra lui-même la plus ample satisfaction que votre équité exigerait. C’est une affaire indépendante du procès et de la lacération du mémoire, sur laquelle j’insiste, et qui parait une suite naturelle de la condamnation des libelles diffamatoires. Ce n’est ici qu’un jugement de conciliation, un procédé d’honneur dont vous êtes le juge naturel. J’attends vos ordres, monsieur ; je viendrai m’informer chez vous du jour et de l’heure que vous aurez donnée à Rigoley et à moi. Il demeure rue Vivienne, chez M. de Saint-Julien, receveur général du clergé.

J’ai l’honneur d’être, avec la plus respectueuse reconnaissance, monsieur, votre très-humble et très-obéissant serviteur.

Voltaire.

  1. Voltaire contre Travenol, par Henri Beaune, 1869. L’autographe de cette lettre faisait partie de la collection Sohier.
  2. Voyez les notes des lettres 1807 et 1839.
  3. Rigoley de Juvigny était employé dans les bureaux du trésorier ou de l’agent général du clergé.