Correspondance de Voltaire/1746/Lettre 1802

Correspondance de Voltaire/1746
Correspondance : année 1746GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 36 (p. 434-435).
1802. À M. DE MONCRIF[1].
À Paris, le 7 avril.

J’ai reçu, mon très-sage et très-aimable ami, le paquet que vous m’avez envoyé. Je vous remercie bien davantage de votre conversation avec le Père Perrusseau[2] ; il est d’une compagnie à laquelle je dois mon éducation, et le peu que je sais. Il n’y a guère de jésuites qui ne sachent que je leur suis attaché dès mon enfance. Les jansénistes peuvent n’être pas mes amis ; mais assurément les jésuites doivent m’aimer, et ils manqueraient à ce qu’ils doivent à la mémoire du Père Porée, qui me regardait comme son fils, s’ils n’avaient pas pour moi un peu d’amitié. Le pape, en dernier lieu, a chargé M. le bailli de Tencin de me faire des compliments de la part de Sa Sainteté, et de m’assurer de sa protection et de sa bienveillance. Je me flatte que les bontés déclarées du père commun m’assurent de celles des principaux enfants, et d’ailleurs le Père Perrusseau pourra savoir un jour que, sans avoir l’honneur de le connaître, je me suis intéressé à lui plus qu’il ne pensait. Mon attachement pour un très-grand roi hérétique ne m’a pas gâté, comme vous voyez.

Adieu ; soyez bien sûr que je suis plus reconnaissant et plus tendre pour mes amis que pour les monarques. Je vous embrasse du meilleur de mon cœur.

  1. Éditeurs, de Cayrol et François.
  2. Confesseur du roi.