Correspondance de Voltaire/1737/Lettre 723

Correspondance : année 1737GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 34 (p. 220-221).
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723. — À M. LE COMTE D’ARGENTAL.
À Leyde, ce 2. j février.

Je ne sais rien de rien. Si vous savez de mes nouvelles, mon respectable et généreux ami, vous me ferez un sensible plaisir de m’en apprendre. Je ne compte point voir cet hiver le prince de Prusse. Ce sera pour cet été, si en effet je me résous d’y aller ; en attendant, je m’occuperai à l’étude. J’aurai des secours où je suis, et je ne perdrai pas mon temps ; on le perd toujours dans une cour. Je sacrifie à présent l’idée d’une tragédie[1] à la physique, à laquelle je me suis remis. Newton l’emporte sur ce prince royal ; il l’emportera bien sur des vers alexandrins ; mais je vous jure que j’y reviendrai, puisque vous les aimez.

Le genre de vie que je mène est tout à fait de mon goût, et me rendrait heureux si je n’étais pas loin d’une personne qui avait daigné faire dépendre son bonheur de vivre avec moi.

Mandez-moi, je vous prie, vos intentions sur notre Enfant. Je n’écris point à Mlle Quinault ; je compte que vous joindrez à toutes vos bontés celle de l’assurer de ma tendre reconnaissance.

Si cet Enfant a en effet gagné sa vie, je vous prie de faire en sorte que son pécule me soit envoyé, tous frais faits. C’est une bagatelle ; mais il m’est arrivé encore de nouveaux désastres ; j’ai fait des pertes dans le chemin.

Souffrez que je joigne ici une lettre pour Thieriot le marchand. Adieu ; on ne peut être plus pénétré de vos bontés. Adieu, les deux frères que j’aimerai et que je respecterai toute ma vie.

  1. Mérope.