Correspondance de Voltaire/1734/Lettre 391

Correspondance de Voltaire/1734
Correspondance : année 1734GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 33 (p. 407-408).
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391. — Á M. CLÉMENT,
à dreux.
19 février.

Vous m’accablez toujours de présents, mon cher monsieur ; vos galanteries m’enchantent et me font rougir, car quid retribuam domino, pro omnibus quæ retribuit mihi (Ps. cxv, v, 12) ? Hélas ! je ne dirai point : calicem accipiam (ibid., v. 13) ; misérable que je suis ! il me faut vivre d’un régime bien indigne de vos dindons et de vos perdrix. Je ne fais point imprimer Adélaïde sitôt, et j’attends la reprise pour la donner au public ; mais je suis charmé de pouvoir vous donner sur le public une petite préférence. Je vais vous faire transcrire Adélaïde pour vous l’envoyer. Il est juste que vous ayez les fruits de ma terre.

J’accepte la très-consolante proposition[1] que vous daignez me faire pour la sainte Quadragésime : c’est un des plus grands plaisirs qu’on puisse faire à un pauvre malade comme moi.

Si vous avez la bonté de charger un de vos gens ou de vos commissionnaires d’envoyer cette petite provision au sieur Demoulin, qui prend soin de mon petit ménage, et qui, par conséquent, demeure chez moi, je vous aurai beaucoup d’obligation, à condition que vous n’empêcherez pas que Demoulin paye très-exactement votre commissionnaire.

Adieu ; je vous embrasse tendrement. Adélaïde fut jouée hier pour la dernière fois. Le parterre eut beau la redemander à grands cris, pendant un quart d’heure, j’ai été inflexible.

Adieu ; mille remerciements, je vous aime trop pour vous écrire avec cérémonie.

  1. Il s’agissait sans doute de lentilles, dont l’espèce est très-belle aux environs de Dreux. (Cl.)