Correspondance de Gustave Flaubert/Tome 8-9/1678
Oui, mon loulou, j’ai eu grand plaisir à me retrouver dans mon pauvre vieux cabinet. Je me promène dans le jardin, qui est maintenant splendide. Je contemple la verdure et les fleurs et j’écoute les petits oiseaux chanter.
Ma « bonne », qui est très gentille et très douce, est dans le ravissement de « la campagne ».
Mes deux premiers jours ont été occupés à mes travaux d’architecture pour Mme Pelouze. Je crois (sans me vanter) avoir fait quelque chose d’ingénieux et qu’elle sera contente.
Hier soir enfin, je me suis remis à Bouvard et Pécuchet ! Il m’est venu plusieurs bonnes idées. Toute la médecine peut être faite dans trois mois, si je ne suis pas dérangé. Les affaires me semblent en bonne voie, et peut-être allons-nous bientôt sortir de notre gêne et de notre inquiétude.
Ce soir, j’ai dîné chez Mme Lapierre. Son mari m’a paru plein d’ardeur pour nous obliger. À la fin de la semaine, j’irai avec eux au Vaudreuil. Demain, j’attends ce bon Laporte à déjeuner. Il me ramènera Julio.
[…] Tantôt, sur l’Eunion, vue de Caudron, et celle d’une procession qui se traînait en psalmodiant le long du bord de l’eau.
Quelle chaleur ! on tombe sur les bottes. Ernest t’a-t-il raconté l’histoire du père Briant mordu par son âne ? Ils ont pendu l’âne pour le punir ; comme les Carthaginois crucifiaient les lions.
Je te plains, pauvre chat, d’être à Paris. On est si bien à Croisset ! Quelle paix ! et puis, plus de redingotes à mettre ! plus d’escalier à monter ! Mais la semaine prochaine je vais perdre encore trois ou quatre jours ! J’en enrage d’avance. Espérons que c’est la fin.
Là-dessus, bonne nuit, chère Caro. Je retourne à ma page. Serviteur !
Ta Nounou te bécote.