Correspondance de Gustave Flaubert/Tome 7/1588

Louis Conard (Volume 7p. 314-315).

1588. À SA NIÈCE CAROLINE.
[Croisset.] Nuit de lundi, 2 heures [26 juin 1876].

Si je ne lui écrivais pas ce soir, ma pauvre fille serait plus de quatre jours sans avoir des nouvelles de Vieux, qui tient à lui donner le bon exemple, en tout ! Oui, chérie, il faut se tenir le bec hors de l’eau, autant que possible, et quand on n’a pas de courage, faire semblant d’en avoir pour en donner aux autres. Ils vous le rendront à l’occasion. Tu dois, par ta gentillesse, fortifier ton mari dans ses moments de langueur. Si le petit coin d’azur, qui apparaît maintenant à l’horizon, s’efface, il en reviendra un autre plus large, et la bourrasque sera finie.

En allant hier dîner chez nos bons amis de Saint-Sever (où je croyais trouver G. Pouchet qui n’a point comparu), j’ai fait 1o une visite à Mme Censier (en reconnaissance de celles qu’elle nous a faites l’été dernier) ; 2o j’ai contemplé un reposoir, rue Haranguerie, et 3o assisté au retour des courses ! Spectacle pitoyable ! Quelle triste ville que Rouen ! nom d’un nom ! quelle piètre localité !

Mon Moscove m’a écrit une lettre charmante où il me charge de présenter ses meilleurs souvenirs à Mme Commanville et à son mari. Il y a ici, pour vous, un billet annonçant la naissance d’un enfant de M. Lezéleuc de Kerouara ; l’enfant est une fille, Yvonne, nom chic !

Et voilà tout, pauvre chat ! Je me baigne dans la rivière tous les soirs, puis je dîne en compagnie de Julio, tout en continuant à retourner mes phrases. Ta Nounou travaille raide et t’embrasse tendrement.