Correspondance de Gustave Flaubert/Tome 7/1505
Il me semble, mon loulou, que : puisque tu ne resteras que quinze jours dans le pauvre Croisset, tu pourrais bien activer tes emménagements, afin de venir ici plus promptement. Une semaine et demie pour faire tes paquets ! ça me semble « exagéré ». Allons, dépêche-toi ! voyons ! et arrive.
J’ai peur d’être, pendant que tu seras près de moi, appelé à Paris. Ce sera, y compris l’aller et le retour, quatre jours de moins à jouir de ta compagnie.
Samedi prochain, je vais voir la ferme de Lizors. Un des jours de la semaine prochaine j’irai à Rouen pour conférer avec le jardinier Beaucantin[1], auquel j’ai demandé un rendez-vous. Je prépare actuellement mon premier chapitre (l’agriculture et le jardinage). L’introduction est faite. C’est bien peu comme nombre de pages, mais enfin je suis en route, ce qui n’était pas commode. Mais quel livre ! Hier au soir, à minuit, j’en suais à grosses gouttes, bien que ma fenêtre fût ouverte. Le difficile dans un sujet pareil c’est de varier les tournures. Si je réussis, ce sera, sérieusement parlant, le comble de l’Art.
Lundi, Raoul-Duval est venu m’inviter à dîner pour le lendemain, et mardi j’ai fait chez lui un dîner très gentil avec M. et Mme Lapierre, et Lizot[2], qui n’a pas été officiel. Mme Lapierre trouve que le jeune Baudry est devenu si ennuyeux qu’il en est infréquentable. Elle ne peut plus le voir sans dormir immédiatement.
Adieu, pauvre chat. Active tes préparatifs et viens causer longuement dans le cabinet de
Vieux.
Julie m’ennuie à force de me demander quand viendra « Mme Commanville ». La voilà rassurée, ce qui ne l’empêche pas de toujours pousser des soupirs, comme un accompagnement de sa claudication.