Correspondance de Gustave Flaubert/Tome 7/1464
Hier, en arrivant ici, j’ai trouvé sur ma table le manuscrit du Sexe faible très bien enveloppé et cacheté, avec le timbre du Ministère des Beaux-Arts et, dans l’enveloppe, une lettre dont je t’envoie la copie, car j’ai peur de perdre l’original. C’est un trésor !
Savoures-en tous les mots, mon bon, et jusqu’à la signature.
Note que je n’avais nullement chargé ton père d’aller chercher le manuscrit, et que Duquesnel ne m’a pas encore répondu.
Est-ce assez joli d’insolence ! On ne fait pas cela à un inconnu.
J’avoue que j’en suis resté quelques minutes abasourdi. Voilà comme il est bon d’avoir des amis !…
Ton papa est drôle, et il a des messieurs sous ses ordres qui écrivent de charmantes lettres.
Eh bien ! j’ai été immédiatement au théâtre de Cluny et maintenant le Directeur est en train de lire le Sexe faible.
Mais je n’aurai sa réponse qu’à mon retour de Suisse.
Que dis-tu aussi du jeune Rohant, qui n’a pas répondu à ma lettre et qui n’est même pas venu prendre chez mon portier un exemplaire de Saint Antoine qu’il avait réclamé avec passion !
Là-dessus, je t’embrasse, et m’enfuis vers les hauts sommets.
Ton