Correspondance de Gustave Flaubert/Tome 6/1125
Tu es bien gentille de nous écrire si souvent ! Continue.
Sous ta résignation apparente, tu me sembles avoir une grande inquiétude. Épanche-toi avec ton pauvre Vieux, ma chère fille.
Je suis devenu plus calme. Je reste enfermé toute la journée et, seul, je m’abandonne à tout mon chagrin. J’ai essayé plusieurs fois de travailler : impossible ! Le pire, c’est l’heure des repas.
Demain matin, nous aurons à déjeuner Bataille, qui m’a l’air très philosophe.
Ernest travaille-t-il encore ? Je croyais que tu serais partie pour l’Angleterre, hier.
Si au moins nous étions ensemble ! La vue de ta bonne mine me ferait du bien.
Paris est décidé à la résistance quand même, et les Prussiens vont refluer sur la province. Cela me paraît immanquable. C’est une question de temps. Rouen est décidé à céder tout de suite ; mais le département se défendra… Comment ?
Adieu, pauvre chérie. Bon courage, je t’embrasse bien fort.
Ton Vieux.
Je vais m’équiper pour l’exercice[1].
- ↑ Flaubert avait été nommé lieutenant de la garde nationale de Croisset.