Correspondance 1812-1876, 6/1876/CMLXIII


Texte établi par Calmann-Lévy,  (Correspondance Tome 6 : 1870-1876p. 399-400).


CMLXIII

À M. CHARLES-EDMOND, À PARIS


Nohant, 21 avril 1876.


Cher ami,

Je vous remercie pour ce bel article sur mon compte ; je voudrais aussi remercier l’auteur ; car il y a de la sympathie dans son appréciation. Chargez-vous de lui dire que j’y suis tout à fait sensible et qu’être approuvée en si beaux et si bon termes est un honneur pour moi. Je ne me souviens pas — je lis si peu le nouveau — d’avoir lu d’autres articles de M. Anatole France. Il a beaucoup de style, une belle forme simple et dans le vrai de notre langue. Ça devient joliment rare ! cultivez et encouragez ce jeune talent, vous n’en trouverez plus beaucoup.

Dans cinquante ans, le sens du français sera tout transformé, c’est inévitable ; c’est l’œuvre du journalisme, qui écrit au jour le jour et qui habitue le public à ses procédés. Je comprends les saintes colères de Scherer ! Qu’y faire ? Rien. Patienter, comme en tout, et espérer qu’une bonne réaction succédera à une mauvaise.

Que devenez-vous ? Comme vous m’écrivez peu ! Ne viendrez-vous pas voir fleurir nos lilas ? nous nous portons tous bien ; mais, quand vous ne dites rien, nous rêvons de maladie et d’accidents chez vous.

À vous de cœur.

G. SAND.