Traduction par Claude-Étienne Savary Voir et modifier les données sur Wikidata.
G. Dufour (2p. 48-56).





MARIE. La paix soit avec elle.


donné à la mecque, composé de 98 versets
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Au nom de Dieu clément et miséricordieux.


K. H. I. A. S. [1] Le Seigneur se souvint de sa miséricorde envers son serviteur Zacharie,

Lorsqu’il invoqua son nom dans le secret.

Seigneur, dit-il, mon corps est tombé dans l’infirmité. Les cheveux blancs couvrent ma tête.

Je n’ai jamais été malheureux dans les vœux que je t’ai adressés.

Je crains ceux qui hériteront de mon rang. Ma femme est stérile. Donne-moi un fils, et mets le comble à tes faveurs.

Qu’il soit mon héritier ; qu’il ait l’héritage de la famille de Jacob ; et qu’il te soit agréable.

Zacharie, nous t’annonçons un fils nommé Jean.

Personne avant lui n’a porté ce nom.

Seigneur, répliqua Zacharie, comment, aurai-je ce fils ? Mon épouse est stérile, et je touche à la décrépitude[2].

Il en sera ainsi. Ce prodige n’est point au-dessus de ma puissance, dit le Seigneur. C’est moi qui t’ai créé de rien.

Seigneur, ajouta le vieillard, donne-moi un signe pour garant de ta promesse. Tu seras muet pendant trois jours, reprit l’ange.

Il sortit du sanctuaire, et s’avançant vers les Hébreux, il leur faisait signe de louer Dieu le matin et le soir.

Jean ! lis les écritures avec ferveur. Nous lui donnâmes la sagesse dès sa plus tendre enfance.

Il eut la bienfaisance et la piété en partage. Juste envers ses parens, il ne connut ni l’orgueil, ni la désobéissance.

La paix fut avec lui à sa naissance, à sa mort ; elle l’accompagnera au jour de la résurrection.

Célèbre Marie dans le Coran ; célèbre le jour où elle s’éloigna de sa famille, du côté de l’Orient.

Elle prit en secret un voile[3] pour se couvrir, et nous lui envoyâmes Gabriel, notre esprit, sous la forme humaine.

Le miséricordieux est mon refuge, s’écria Marie : si tu le crains……

Je suis l’envoyé de ton Dieu, dit l’ange ; je viens t’annoncer un fils béni.

D’où me viendra cet enfant, répondit la vierge ? Nul mortel ne s’est approché de moi, et le vice m’est inconnu.

Il en sera ainsi, répliqua l’ange. La parole du Très-Haut en est le garant. Ce miracle lui est facile. Ton fils sera le prodige et le bonheur de l’univers. Tel est l’ordre du ciel.

Elle conçut, et elle se retira dans un lieu écarté.

Les douleurs de l’enfantement la surprirent auprès d’un palmier, et elle s’écria : Plût à Dieu que je fusse morte, oubliée et abandonnée des humains, avant ma conception !

Ne t’afflige point, lui cria l’ange, Dieu a fait couler près de toi un ruisseau.

Ébranle le palmier[4], et tu verras tomber des dattes mûres.

Mange, bois, essuie tes pleurs, et si quelqu’un t’interroge,

Dis-lui : J’ai voué un jeûne au miséricordieux, et je ne puis parler à un homme.

Elle retourna vers sa famille, portant son fils dans ses bras. Marie, lui dit-on, il vous est arrivé une étrange aventure.

Sœur d’Aaron[5], votre père était juste et votre mère vertueuse.

Pour toute réponse, elle leur fit signe d’interroger son fils. Nous adresserons-nous, lui dit-on, à un enfant au berceau ?

Je suis le serviteur de Dieu, répondit l’enfant. Il m’a donné l’Évangile et m’a établi prophète.

Sa bénédiction me suivra partout. Il m’a commandé d’être toute ma vie fidèle au précepte de la prière et de l’aumône.

Il a mis dans mon cœur la piété filiale, et m’a délivré de l’orgueil qu’accompagne la misère.

La paix me fut donnée au jour de ma naissance. Elle accompagnera ma mort et ma résurrection.

Ainsi parla Jésus, vrai fils de Marie, sujet des doutes d’un grand nombre.

Dieu ne saurait avoir un fils. Loué soit son nom ! il commande, et le néant s’anime à sa voix.

Dieu est mon seigneur et le vôtre. Adorez-le, c’est le chemin du salut.

Les sectaires ont beaucoup disputé ; mais malheur à ceux qui nient l’assemblée du grand jour !

Que n’entendront, que ne verront-ils point, quand ils paraîtront devant notre tribunal ? Aujourd’hui ils sont dans un aveuglement profond.

Annonce-leur le temps des soupirs, lorsque l’arrêt sera prononcé. Maintenant ils reposent dans l’insouciance et l’incrédulité.

La terre et tout ce qu’elle renferme est notre héritage. Toutes les créatures reviendront à nous.

Rappelle dans le Coran le souvenir d’Abraham. Il fut juste et prophète.

O mon père ! disait-il, pourquoi adores-tu des idoles qui ne voient ni n’entendent, et qui ne sauraient te secourir.

O mon père ! j’ai reçu des lumières que tu n’as pas. Suis-moi, je te conduirai dans le chemin du salut.

O mon père ! n’adore pas Satan, il fut rebelle aux ordres du miséricordieux.

O mon père ! je crains que Dieu n’appesantisse son bras sur toi, et que tu ne deviennes le compagnon de Satan.

Abraham, répondit le vieillard, si tu rejettes le culte de mes dieux, je te lapiderai. Éloigne-toi de moi.

La paix soit avec toi, continua Abraham. J’implorerai pour mon père la miséricorde de Dieu. Sa bonté me protége.

Je me sépare de vous et de vos idoles. J’invoquerai le nom du Très-Haut. Peut-être ne rejettera-t-il pas ma prière.

Il quitta sa famille et les dieux qu’elle adorait. Nous lui donnâmes Isaac et Jacob, tous deux prophètes.

Nous les comblâmes de nos faveurs, et nous leur inspirâmes le langage sublime de la vérité.

Chante dans le Coran les vertus de Moïse. Il fut envoyé et prophète.

Nous l’appelâmes du flanc droit du mont Sinaï, et nous le fîmes approcher pour s’entretenir avec nous.

Nous créâmes son frère Aaron prophète, par un bienfait de notre miséricorde.

Publie dans le Coran la louange d’Ismaël, fidèle à sa promesse, envoyé et prophète.

Il recommandait à sa famille la prière et l’aumône. Il fut agréable aux yeux de l’Éternel.

Célèbre Henoch[6] dans le Coran ; il fut juste et prophète.

Nous l’enlevâmes dans un lieu sublime.

Tels sont, entre les fils d’Adam, de Noë, d’Abraham et d’Israël, les prophètes que Dieu combla de ses grâces. Il les choisit parmi ceux qu’il éclaira du flambeau de la foi. Lorsqu’on leur récitait les merveilles du miséricordieux, le front prosterné, les yeux baignés de larmes, ils adoraient sa majesté suprême.

Une génération pervertie leur a succédé. Elle a abandonné la prière et suivi le torrent de ses passions ; elle sera précipitée dans le fleuve du Tartare.

Mais ceux qui joindront au repentir la foi et les bonnes œuvres, entreront dans les jardins d’Éden ;

Jardins délicieux que le miséricordieux a promis à ses serviteurs, pour les consoler dans leur exil ; ses promesses sont infaillibles.

Les futilités en seront bannies. La paix y régnera. Les hôtes de ce séjour recevront leur nourriture le matin et le soir.

Tel est le Paradis que nos serviteurs vertueux auront pour héritage.

Nous ne sommes descendus que par l’ordre de Dieu. Le passé, le futur, le présent lui appartiennent. Il ne connaît point l’oubli.

Les cieux, la terre, ce que renferme l’espace qui les séparé, forment son domaine. Sers-le : sois constant dans son culte. Lui connais-tu un nom ?

Eh quoi ! dit l’incrédule, lorsque je serai mort ma cendre se ranimera-t-elle de nouveau ?

A-t-il donc oublié que nous l’avons tiré du néant, pour lui donner l’existence ?

J’en jure par ton Dieu, nous rassemblerons les hommes et les démons ; nous en formerons une enceinte dans l’enfer, et nous les forcerons de se tenir à genoux.

Nous choisirons ensuite ceux dont l’insolence aura plus éclaté contre le miséricordieux.

Nous connaîtrons ceux qui ont mérité davantage le tourment des flammes.

Ils y seront précipités ; c’est un décret prononcé par l’Éternel.

Nous délivrerons ceux qui ont craint le Seigneur, et nous laisserons les coupables à genoux.

Lorsque vous prêchez notre doctrine aux infidèles, ils disent aux croyans : Lequel de nos deux partis est le plus fort, et le plus florissant ?

Combien de peuples plus riches et plus puissans qu’eux sont tombés sous nos coups ?

Puisse le miséricordieux prolonger les jours de ceux qui sont plongés dans l’erreur !

Afin qu’ils voient l’accomplissement de nos menaces, soit dans ce monde, soit dans l’autre. Ils connaîtront alors ceux qui sont plus malheureux, et plus dépourvus de secours.

Dieu fortifiera les fidèles qui professeront la vraie religion.

Les bonnes œuvres auront un mérite permanent à ses yeux, et seront magnifiquement récompensées.

N’as-tu pas vu l’infidèle se flatter de recevoir des richesses et des enfans ?

Connaît-il l’avenir ? Dieu lui en a-t-il fait la promesse ?

Il se flatte vainement. Nous écrirons son ostentation, et nous aggraverons ses peines.

Nous lui donnerons les biens qu’il demande sur la terre ; mais il paraîtra nu devant notre tribunal.

Ils comptent sur la protection de leurs divinités chimériques.

Vain espoir ! Elles rejetteront leur encens, et se déclareront contr’eux.

Ne sais-tu pas que nous avons déchaîné les démons contre les incrédules, pour les porter au mal ?

Ne précipite rien contr’eux. Nous comptons leurs jours.

Les justes rassemblés formeront le cortége du miséricordieux.

Les scélérats descendront dans l’enfer.

Ceux-là seuls, qui ont reçu l’alliance divine, auront des intercesseurs.

Ils disent que Dieu a un fils, et ils profèrent un blasphème.

Peu s’en faut que les cieux ne se fendent à ces mots, que la terre ne s’entr’ouvre, et que les montagnes brisées ne s’écroulent.

Ils attribuent un fils au miséricordieux, et il ne saurait en avoir.

Tous les êtres créés au ciel et sur la terre, lui paient un tribut de louanges. Il les a comptés, et il en sait le nombre.

Au jour de la résurrection, tous les hommes paraîtront nus devant lui.

Il fera régner l’amitié entre les croyans vertueux.

Nous avons facilité la lecture du Coran en l’écrivant dans ta langue, afin que tu annonces la félicité à ceux qui craignent le Seigneur, et les tourmens à ceux qui disputent contre lui.

De tant de générations que nous avons anéanties, pourrais-tu faire paraître un seul homme ? Font-elles entendre le plus léger murmure ?


  1. K. H. I. A. S. Ces caractères sont mystérieux, et Dieu seul en a la connaissance. Gelaleddin.
  2. Si l’on en croit Gelaleddin, Zacharie avait alors cent vingt ans et son épouse quatre-vingt-dix-huit.
  3. Dès la plus haute antiquité, les femmes des contrées orientales ont été dans l’usage de se couvrir le visage. De nos jours elles ne paraissent point en public sans être voilées. Ces voiles sont de mousseline et descendent jusqu’à la ceinture. On y laisse deux petites ouvertures, afin qu’elles puissent voir à se conduire. Deux causes doivent avoir introduit parmi les femmes de l’Orient, l’usage de se couvrir le visage, la chaleur excessive qui effacerait bientôt l’éclat de leur teint, et la jalousie excessive des hommes qui ne veulent pas qu’elles soient vues.
  4. Ce palmier était desséché, sans branches et sans feuillage, c’était en hiver. À la voix de l’ange il se couvrit de feuilles et de fruits. Zamchascar.
  5. Cet Aaron était de la famille du prophète de même nom. Il était frère de Marie, et jouissait parmi les Hébreux d’une grande réputation de probité et de vertu. Zamchascar.
  6. Les Arabes débitent beaucoup de fables au sujet d’Henoch. Nous nous contenterons de rapporter ce qu’en dit Ismaël ebn Ali. Henoch fut enlevé au Ciel à l’âge de trois cent cinquante ans. Dieu lui donna l’esprit prophétique et lui révéla les secrets du ciel. Il lui envoya trente volumes sacrés. Henoch fut le premier qui se servit de la plume et de l’épée pour défendre la religion. Il inventa l’astrologie et apprit aux hommes à compter et à peser.