Contes populaires d’Afrique (Basset)/64

E. Guilmoto, Éditeur (Les Littératures populaires, tome XLVIIp. 160-163).

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LA BELETTE ET LA HYÈNE[1]


La belette et la hyène allèrent vivre ensemble dans la forêt. Un jour la hyène tua un animal, le prit, alla trouver la belette et lui dit :

— Voici, j’ai apporté de la viande ; apportez du feu pour que nous la rôtissions et la mangions.

La belette se leva pour aller chercher du feu ; mais après avoir marché un peu, comme elle n’en voyait pas, elle revint vers la hyène en disant :

— Ma sœur, comme je n’ai pas vu de feu quand tu m’as envoyée, je suis revenue.

La hyène, voyant le soleil se couchera l’ouest, pensa que c’était du feu et dit à la belette :

— Veille sur notre viande, parce que je vais aller chercher du feu.

La belette écouta les paroles de la hyène et se mit en devoir de l’attendre. La hyène, désirant prendre du feu, s’avança vers le soleil couchant, mais, quand elle eut marché, le soleil était couché. Alors elle revint vers la belette en disant :

— Bien que je sois allée vers la place du feu, je n’en ai pas vu.

La belette ayant mis la viande dans un trou, la hyène ne la voyait pas et demanda :

— Où est notre viande ? Je t’ai dit de veiller sur elle pendant que j’irais chercher du feu ; mais comme je n’en voyais pas, je suis revenue et je ne vois plus de viande : où l’as-tu mise ? fais-le-moi savoir.

La belette répondit à la hyène en disant :

— Voici : deux hommes sont sortis de la forêt, ont pris la viande et l’ont mise dans un trou ; attends, je vais y aller ; alors tu pourras allonger ta queue vers moi ; j’y attacherai la viande et tu la tireras du trou.

Alors la belette entra dans le trou ; la hyène tendit sa queue, mais l’autre la saisit, attacha un bâton et dit :

— J’ai attaché la viande à ta queue, tire et sors-la.

La hyène était sotte ; elle ne savait pas que la belette la surpassait en habileté ; elle crut que c’était la viande qui y était attachée ; mais lorsqu’elle essaya de tirer sa queue, c’était résistant. Quand la belette lui dit de nouveau : Tire, elle tira, mais elle ne pouvait la sortir.

Alors elle se fâcha et tira avec tant de force que sa queue se brisa. Quand elle l’eut rompue, elle ne vit plus la belette ; celle-ci était restée dans le trou avec la viande et la hyène ne la vit plus.

La hyène s’en alla, et étant entrée dans la forêt, elle rencontra deux hommes. En les voyant, elle se réjouit et dit :

— Maintenant j’ai trouvé de la viande.

Elle alla au-devant d’eux et eux au-devant d’elle. Quand elle les eut rejoints, elle se leva, mais tandis qu’elle se préparait a fondre sur un des hommes forts, espérant en faire son repas, celui-ci, qui ne se préoccupait pas d’elle, fit du feu, prit du bois et le souleva. L’autre homme se leva et marcha contre la hyène qui le vit ; il commença à l’attaquer, saisit une de ses oreilles, la serra fortement, l’arracha et la mit sur le feu. Quand il l’eut exposée un peu au feu, il la reprit et la mangea en sorte que la hyène vit l’homme manger son oreille. À cette vue, elle dit :

— L’homme qui m’a arraché l’oreille et la mange m’épargnera-t-il s’il reste ?

Alors elle courut en arrière dans la forêt.

La belette avait dit à la hyène :

— Viens et faisons amitié ; mais la hyène était sotte, ne sachant pas que la belette la surpassait en finesse. La belette rendit la hyène sans queue et sans oreille et alors elles rompirent leur amitié.

C’est ce que j’ai entendu raconter aux gens. C’est fini.




  1. Koelle, African native Literature, 45-46 ; 160-163.