Contes populaires d’Afrique (Basset)/25

E. Guilmoto, Éditeur (Les Littératures populaires, tome XLVIIp. 71-72).

25

LA HYÈNE, L’ÉLEPHANT, LE LION, LE LÉOPARD, LE CHACAL ET L’ANTILOPE[1].


La hyène, l’éléphant, le lion, le léopard, le chacal et l’antilope passaient la journée en société. L’antilope s’éloigna et s’en alla.

Où est allée l’antilope ? demanda le lion.

— L’antilope s’est enfuie, répondit le chacal.

— Celui qui l’amènera, nous lui donnerons de l’hydromel, dit le lion.

— Mon cher oncle, c’est moi qui l’amènerai, repartit le chacal. Il s’en alla trouver l’antilope et lui dit :

— Quelle tête magnifique ! Quelles belles et fortes cornes tu as ! Pourquoi donc te sauves-tu ? Mon oncle le lion te fait dire : — Qu’as-tu pour nous abandonner ? Lève-toi, à présent.

Ils s’en allèrent ensemble et revinrent vers la société. Alors la hyène chercha à happer l’antilope, mais celle-ci échappa.

Le chacal dit :

— Je vais encore la ramener.

— Bien, ajouta le lion.

Il s’en alla trouver l’antilope.

— Pourquoi donc es-tu partie ? lui demanda-t-il.

— Je suis partie parce que la hyène s’est élancée pour me tuer.

— Mais comme tu es naïve ! la hyène s’est élancée de sa place pour te faire honneur, mais non, pour te tuer, répliqua le chacal.

— Oui dà ! dit l’antilope, et elle partit avec lui ; tous deux arrivèrent vers la société. Lorsqu’elle entra, le lion s’élança sur elle, la tua et ils la dépouillèrent. Le chacal enleva le cœur dans la chair de l’antilope : on partagea la viande, on chercha le cœur, on ne le trouva pas.

— Où donc est le cœur ? demanda le lion.

— Mon oncle, dit le chacal, est-ce que l’antilope, après avoir échappé une fois, aurait été assez sotte pour revenir, si elle avait eu un cœur ?

— Oui, certes, elle n’aurait pas été assez sotte une seconde fois, dit la société.

Le chacal réussit à ceci : il dupa l’antilope, alla la chercher et la livra à la mort qu’elle avait évitée.



  1. Reinisch, Die Saho-Sprache, t. I, p. 187-189.