Contes populaires d’Afrique (Basset)/119

E. Guilmoto, Éditeur (Les Littératures populaires, tome XLVIIp. 300-302).
LXVII. — BOUNDÉI[1]

119

POURQUOI LA HYÈNE NE FAIT PAS PARTIE DES GENS CONVENABLES[2]


Atrefois la hyène faisait partie des gens de qualité. Sa fonction était d’enterrer les morts. Quand quelqu’un mourait, on appelait la hyène pour le mettre en terre.

Un jour, un homme mourut dans un village voisin et la hyène fut appelée pour l’enterrer. Le cadavre fut emporté devant le village ; les gens vinrent et le mirent dans la fosse. La hyène lut les prières. La fosse fut comblée ; les gens se séparèrent, s’affligèrent jusqu’au soir, puis se consolèrent. Quand ils furent allés dormir, la hyène revint à la fosse et déterra le mort pour le dévorer. Elle l’avait déjà traîné sur le chemin lorsqu’elle se rencontra avec un homme qui revenait de son piège et portait une antilope.

La hyène lui demanda ce qu’il portait. Il lui répondit que c’était une antilope qu’il avait prise dans ses fosses. De son côté, il n’interrogea pas la hyène parce qu’il avait vu depuis quelque temps qu’elle traînait un cadavre. La hyène lui demanda de vouloir bien, quand il rentrerait chez lui, ne pas dévoiler ce qu’il avait vu. Il s’y engagea et reprit son chemin.

Ensuite la hyène pensa qu’il pourrait bien révéler aux gens qu’il l’avait vue emporter un cadavre pour le dévorer. Elle traîna le cadavre plus loin et suivit l’homme silencieusement jusqu’à sa maison. Quand il fut arrivé à sa porte, il déposa l’antilope, appela sa femme pour lui ouvrir, entra en oubliant l’antilope dehors. Immédiatement, la hyène se glissa tout près, prit l’antilope, mit le cadavre à sa place et s’en alla.

L’homme dit alors à sa femme :

— Va à la porte et rapporte l’antilope.

Elle sortit, aperçut le cadavre près de la porte, rentra en toute hâte à la maison et dit à son mari :

— Comment ! c’est un cadavre.

L’homme l’examina et vit qu’en effet il en était ainsi.

Le lendemain matin, il convoqua tous les gens et leur raconta ce qui était arrivé. Dès lors la hyène fut exclue du nombre des gens de qualité.




  1. Le Boundéi est parlé par les populations qui habitent dans l’Afrique Orientale allemande les terres basses entre le Chambala, la rivière Louvou et l’Oumba.
  2. Woodward, Stories in the Boundei language, Londres, Society for promoting of Christian knowledge, in-12, p. 28-29 ; — Seidel, Afrikanishe Geschichten une Lieder, p. 182-183.