Contes arabes (Basset)/Histoire des dix vizirs/Cinquième journée
CINQUIÈME JOURNÉE
e cinquième jour, le cinquième vizir, qui avait nom Djehrbour27, se présenta
chez le roi et lui dit, après s’être prosterné :
« Prince, lorsque tu viens à remarquer ou à
apprendre que quelqu’un jette chez toi des
regards indiscrets, tu dois lui arracher les
yeux. À plus forte raison, celui que tu vois
au milieu de ton palais, étendu sur ton lit
royal et songeant à te déshonorer, celui-là
doit périr nécessairement : nous ne te poussons à agir de la sorte que par affection pour
ta dynastie et par zèle de te servir et de
t’aimer. Comment est-il possible de laisser
vivre un seul instant ce jeune homme ? »
Ce discours remplit Azâd-bakht de colère et il ordonna d’amener sur-le-champ le prisonnier ; ce qui fut fait, et, en le voyant, il lui cria : « Malheur à toi ! tu as commis un grand crime ; ta vie ne s’est que trop prolongée, il faut absolument que tu périsses : rien n’est pour nous préférable à ta mort. »
« Ô roi, répondit le prisonnier, sache que devant Dieu je suis innocent ; c’est pourquoi j’espère vivre. Celui qui n’a rien à se reprocher n’est pas inquiet de l’avenir ; le chagrin et les soucis ne peuvent triompher de lui, tandis que le coupable sent toujours sa faute peser sur lui. Quand bien même sa vie se prolonge, il lui arrive comme au roi Dâdbin28 et à son vizir. »
« Quelle est cette histoire ? » demanda Azâd-bakht.
Le jeune homme commença :