Consuelo/Chapitre XXXVII

Michel Lévy (tome Ip. 324-334).

XXXVII.

Lorsque Amélie fut appelée à traduire la phrase que Consuelo avait écrite sur son carnet et gravée dans sa mémoire, elle dit qu’elle ne la comprenait pas du tout, quoiqu’elle pût la traduire littéralement par ces mots :

Que celui à qui on a fait tort te salue.

« Peut-être, ajouta-t-elle, veut-il parler d’Albert, ou de lui-même, en disant qu’on leur a fait tort en les taxant de folie, eux qui se croient les seuls hommes raisonnables qu’il y ait sur la terre. Mais à quoi bon chercher le sens des discours d’un insensé ? Ce Zdenko occupe beaucoup plus votre imagination qu’il ne mérite.

— C’est la croyance du peuple dans tous les pays, répondit Consuelo, d’attribuer aux fous une sorte de lumière supérieure à celle que perçoivent les esprits positifs et froids. J’ai le droit de conserver les préjugés de ma classe, et je ne puis jamais croire qu’un fou parle au hasard en disant des paroles qui nous paraissent inintelligibles.

— Voyons, dit Amélie, si le chapelain, qui est très-versé dans toutes les formules anciennes et nouvelles dont se servent nos paysans, connaîtra celle-ci. »

Et, courant vers le bonhomme, elle lui demanda l’explication de la phrase de Zdenko.

Mais ces paroles obscures parurent frapper le chapelain d’une affreuse lumière.

« Dieu vivant ! s’écria-t-il en pâlissant, où donc votre seigneurie a-t-elle entendu un semblable blasphème ?

— Si c’en est un, je ne le devine pas, répondit Amélie en riant, et c’est pour cela que j’en attends de vous la traduction.

— Mot à mot, c’est bien, en bon allemand, ce que vous venez de dire, madame, c’est bien « Que celui à qui on a fait tort te salue » ; mais si vous voulez en savoir le sens (et j’ose à peine le prononcer), c’est, dans la pensée de l’idolâtre qui le prononce, « que le diable soit avec toi ! »

— En d’autres termes, reprit Amélie en riant plus fort : « Va au diable !  » Eh bien ! c’est un joli compliment, et voilà ce qu’on gagne, ma chère Nina, à causer avec les fous. Vous ne pensiez pas que Zdenko, avec un sourire si affable et des grimaces si enjouées, vous adressait un souhait aussi peu galant.

— Zdenko ? s’écria le chapelain. Ah ! c’est ce malheureux idiot qui se sert de pareilles formules ? À la bonne heure ! je tremblais que ce ne fût quelque autre… et j’avais tort ; cela ne pouvait sortir que de cette tête farcie des abominations de l’antique hérésie ! Où prend-il ces choses à peu près inconnues et oubliées aujourd’hui ? L’esprit du mal peut seul les lui suggérer.

— Mais c’est tout simplement un fort vilain jurement dont le peuple se sert dans toutes les langues, repartit Amélie ; et les catholiques ne s’en font pas plus faute que les autres.

— Ne croyez pas cela, baronne, dit le chapelain. Ce n’est pas une malédiction dans l’esprit égaré de celui qui s’en sert, c’est un hommage et une bénédiction, au contraire ; et là est le crime. Cette abomination vient des lollards, secte détestable qui engendra celle des vaudois, laquelle engendra celle des hussites…

— Laquelle en engendra bien d’autres ! dit Amélie en prenant un air grave pour se moquer du bon prêtre. Mais, voyons, monsieur le chapelain, expliquez-nous donc comment ce peut être un compliment que de recommander son prochain au diable ?

— C’est que, dans la croyance des lollards, Satan n’était pas l’ennemi du genre humain, mais au contraire son protecteur et son patron. Ils le disaient victime de l’injustice et de la jalousie. Selon eux, l’archange Michel et les autres puissances célestes qui l’avaient précipité dans l’abîme étaient de véritables démons, tandis que Lucifer, Belzébuth, Astaroth, Astarté, et tous les monstres de l’enfer étaient l’innocence et la lumière même. Ils croyaient que le règne de Michel et de sa glorieuse milice finirait bientôt, et que le diable serait réhabilité et réintégré dans le ciel avec sa phalange maudite. Enfin ils lui rendaient un culte impie, et s’abordaient les uns les autres en se disant : Que celui à qui on a fait tort, c’est-à-dire celui qu’on a méconnu et condamné injustement, te salue, c’est-à-dire, te protège et t’assiste.

— Eh bien, dit Amélie en riant aux éclats, voilà ma chère Nina sous des auspices bien favorables, et je ne serais pas étonnée qu’il fallût bientôt en venir avec elle à des exorcismes pour détruire l’effet des incantations de Zdenko. »

Consuelo fut un peu émue de cette plaisanterie. Elle n’était pas bien sûre que le diable fût une chimère, et l’enfer une fable poétique. Elle eût été portée à prendre au sérieux l’indignation et la frayeur du chapelain, si celui-ci, scandalisé des rires d’Amélie, n’eût été, en ce moment, parfaitement ridicule. Interdite, troublée dans toutes les croyances de son enfance par cette lutte où elle se voyait lancée, entre la superstition des uns et l’incrédulité des autres, Consuelo eut, ce soir-là, beaucoup de peine à dire ses prières. Elle cherchait le sens de toutes ces formules de dévotion qu’elle avait acceptées jusque-là sans examen, et qui ne satisfaisaient plus son esprit alarmé. « À ce que j’ai pu voir, pensait-elle, il y a deux sortes de dévotions à Venise. Celle des moines, des nonnes, et du peuple, qui va trop loin peut-être ; car elle accepte, avec les mystères de la religion, toutes sortes de superstitions accessoires, l’Orco (le diable des lagunes), les sorcières de Malamocco, les chercheuses d’or, l’horoscope, et les vœux aux saints pour la réussite des desseins les moins pieux et parfois les moins honnêtes ; celle du haut clergé et du beau monde, qui n’est qu’un simulacre ; car ces gens-là vont à l’église comme au théâtre, pour entendre la musique et se montrer ; ils rient de tout, et n’examinent rien dans la religion, pensant que rien n’y est sérieux, que rien n’y oblige la conscience, et que tout est affaire de forme et d’usage. Anzoleto n’était pas religieux le moins du monde ; c’était un de mes chagrins, et j’avais raison d’être effrayée de son incrédulité. Mon maître Porpora… que croyait-il ? je l’ignore. Il ne s’expliquait point là-dessus, et cependant il m’a parlé de Dieu et des choses divines dans le moment le plus douloureux et le plus solennel de ma vie. Mais quoique ses paroles m’aient beaucoup frappée, elles n’ont laissé en moi que de la terreur et de l’incertitude. Il semblait qu’il crût à un Dieu jaloux et absolu, qui n’envoyait le génie et l’inspiration qu’aux êtres isolés par leur orgueil des peines et des joies de leurs semblables. Mon cœur désavoue cette religion sauvage, et ne peut aimer un Dieu qui me défend d’aimer. Quel est donc le vrai Dieu ? Qui me l’enseignera ? Ma pauvre mère était croyante ; mais de combien d’idolâtries puériles son culte était mêlé ! Que croire et que penser ? Dirai-je, comme l’insouciante Amélie, que la raison est le seul Dieu ? Mais elle ne connaît même pas ce Dieu-là, et ne peut me l’enseigner ; car il n’est pas de personne moins raisonnable qu’elle. Peut-on vivre sans religion ? Alors pourquoi vivre ? En vue de quoi travaillerais-je ? en vue de quoi aurais-je de la pitié, du courage, de la générosité, de la conscience et de la droiture, moi qui suis seule dans l’univers, s’il n’est point dans l’univers un Être suprême, intelligent et plein d’amour, qui me juge, qui m’approuve, qui m’aide, me préserve et me bénisse ? Quelles forces, quels enivrements puisent-ils dans la vie, ceux qui peuvent se passer d’un espoir et d’un amour au-dessus de toutes les illusions et de toutes les vicissitudes humaines ?

« Maître suprême ! s’écria-t-elle dans son cœur, oubliant les formules de sa prière accoutumée, enseigne-moi ce que je dois faire. Amour suprême ! enseigne-moi ce que je dois aimer. Science suprême ! enseigne-moi ce que je dois croire. »

En priant et en méditant de la sorte, elle oublia l’heure qui s’écoulait, et il était plus de minuit lorsque avant de se mettre au lit, elle jeta un coup d’œil sur la campagne éclairée par la lune. La vue qu’on découvrait de sa fenêtre était peu étendue, à cause des montagnes environnantes, mais extrêmement pittoresque. Un torrent coulait au fond d’une vallée étroite et sinueuse, doucement ondulée en prairies sur la base des collines inégales qui fermaient l’horizon, s’entr’ouvrant çà et là pour laisser apercevoir derrière elles d’autres gorges et d’autres montagnes plus escarpées et toutes couvertes de noirs sapins. La clarté de la lune à son déclin se glissait derrière les principaux plans de ce paysage triste et vigoureux, où tout était sombre, la verdure vivace, l’eau encaissée, les roches couvertes de mousse et de lierre.

Tandis que Consuelo comparait ce pays à tous ceux qu’elle avait parcourus dans son enfance, elle fut frappée d’une idée qui ne lui était pas encore venue ; c’est que cette nature qu’elle avait sous les yeux n’avait pas un aspect nouveau pour elle, soit qu’elle eût traversé autrefois cette partie de la Bohême, soit qu’elle eût vu ailleurs des lieux très-analogues. « Nous avons tant voyagé, ma mère et moi, se disait-elle, qu’il n’y aurait rien d’étonnant à ce que je fusse déjà venue de ce côté-ci. J’ai un souvenir distinct de Dresde et de Vienne. Nous avons bien pu traverser la Bohême pour aller d’une de ces capitales à l’autre. Il serait étrange cependant que nous eussions reçu l’hospitalité dans quelque grange du château où me voici logée comme une demoiselle d’importance ; ou bien que nous eussions gagné, en chantant, un morceau de pain à la porte de quelqu’une de ces cabanes où Zdenko tend la main et chante ses vieilles chansons ; Zdenko, l’artiste vagabond, qui est mon égal et mon confrère, bien qu’il n’y paraisse plus ! »

En ce moment, ses regards se portèrent sur le Schreckenstein, dont on apercevait le sommet au-dessus d’une éminence plus rapprochée, et il lui sembla que cette place sinistre était couronnée d’une lueur rougeâtre qui teignait faiblement l’azur transparent du ciel. Elle y porta toute son attention, et vit cette clarté indécise augmenter, s’éteindre et reparaître, jusqu’à ce qu’enfin elle devint si nette et si intense, qu’elle ne put l’attribuer à une illusion de ses sens. Que ce fût la retraite passagère d’une bande de zingari, ou le repaire de quelque brigand, il n’en était pas moins certain que le Schreckenstein était occupé en ce moment par des êtres vivants ; et Consuelo, après sa prière naïve et fervente au Dieu de vérité, n’était plus disposée du tout à croire à l’existence des êtres fantastiques et malfaisants dont la chronique populaire peuplait la montagne. Mais n’était-ce pas plutôt Zdenko qui allumait ce feu, pour se soustraire au froid de la nuit ? Et si c’était Zdenko, n’était-ce pas pour réchauffer Albert que les branches desséchées de la forêt brûlaient en ce moment ? On avait vu souvent cette lueur sur le Schreckenstein ; on en parlait avec effroi, on l’attribuait à quelque fait surnaturel. On avait dit mille fois qu’elle émanait du tronc enchanté du vieux chêne de Ziska. Mais le Hussite n’existait plus ; du moins il gisait au fond du ravin, et la clarté rouge brillait encore à la cime du mont. Comment ce phare mystérieux n’appelait-il pas les recherches vers cette retraite présumée d’Albert ?

« Ô apathie des âmes dévotes ! pensa Consuelo ; tu es un bienfait de la Providence, ou une infirmité des natures incomplètes ? » Elle se demanda en même temps si elle aurait le courage d’aller seule, à cette heure, au Schreckenstein, et elle se répondit que, guidée par la charité, elle l’aurait certainement. Mais elle pouvait se flatter un peu gratuitement à cet égard ; car la clôture sévère du château ne lui laissait aucune chance d’exécuter ce dessein.

Dès le matin, elle s’éveilla pleine de zèle, et courut au Schreckenstein. Tout y était silencieux et désert. L’herbe ne paraissait pas foulée autour de la pierre d’Épouvante. Il n’y avait aucune trace de feu, aucun vestige de la présence des hôtes de la nuit. Elle parcourut la montagne dans tous les sens, et n’y trouva aucun indice. Elle appela Zdenko de tous côtés : elle essaya de siffler pour voir si elle éveillerait les aboiements de Cynabre ; elle se nomma à plusieurs reprises ; elle prononça le nom de Consolation dans toutes les langues qu’elle savait ; elle chanta quelques phrases de son cantique espagnol, et même de l’air bohémien de Zdenko, qu’elle avait parfaitement retenu. Rien ne lui répondit. Le craquement des lichens desséchés sous ses pieds, et le murmure des eaux mystérieuses qui couraient sous les rochers, furent les seuls bruits qui lui répondirent.

Fatiguée de cette inutile exploration, elle allait se retirer après avoir pris un instant de repos sur la pierre, lorsqu’elle vit à ses pieds une feuille de rose froissée et flétrie. Elle la ramassa, la déplia, et s’assura bien que ce ne pouvait être qu’une feuille du bouquet qu’elle avait jeté à Zdenko ; car la montagne ne produisait pas de roses sauvages, et d’ailleurs ce n’était pas la saison. Il n’y en avait encore que dans la serre du château. Ce faible indice la consola de l’apparente inutilité de sa promenade, et la laissa de plus en plus persuadée que c’était au Schreckenstein qu’il fallait espérer de découvrir Albert.

Mais dans quel antre de cette montagne impénétrable était-il donc caché ? il n’y était donc pas à toute heure, ou bien il était plongé, en ce moment, dans un accès d’insensibilité cataleptique ; ou bien encore Consuelo s’était trompée en attribuant à sa voix quelque pouvoir sur lui, et l’exaltation qu’il lui avait montrée n’était qu’un accès de folie qui n’avait laissé aucune trace dans sa mémoire. Il la voyait, il l’entendait peut-être maintenant, et il se riait de ses efforts, et il méprisait ses inutiles avances.

À cette dernière pensée, Consuelo sentit une rougeur brûlante monter à ses joues, et elle quitta précipitamment le Schreckenstein en se promettant presque de n’y plus revenir. Cependant elle y laissa un petit panier de fruits qu’elle avait apporté.

Mais le lendemain, elle trouva le panier à la même place ; on n’y avait pas touché. Les feuilles qui recouvraient les fruits n’avaient pas même été dérangées par un mouvement de curiosité. Son offrande avait été dédaignée, ou bien ni Albert ni Zdenko n’étaient venus par là ; et pourtant la lueur rouge d’un feu de sapin avait brillé encore durant cette nuit sur le sommet de la montagne.

Consuelo avait veillé jusqu’au jour pour observer cette particularité. Elle avait vu plusieurs fois la clarté décroître et se ranimer, comme si une main vigilante l’eût entretenue. Personne n’avait vu de zingari dans les environs. Aucun étranger n’avait été signalé sur les sentiers de la forêt ; et tous les paysans que Consuelo interrogeait sur le phénomène lumineux de la pierre d’épouvante, lui répondaient en mauvais allemand, qu’il ne faisait pas bon d’approfondir ces choses-là, et qu’il ne fallait pas se mêler des affaires de l’autre monde.

Cependant, il y avait déjà neuf jours qu’Albert avait disparu. C’était la plus longue absence de ce genre qu’il eût encore faite, et cette prolongation, jointe aux sinistres présages qui avaient annoncé l’avènement de sa trentième année, n’était pas propre à ranimer les espérances de la famille. On commençait enfin à s’agiter ; le comte Christian soupirait à toute heure d’une façon lamentable ; le baron allait à la chasse sans songer à rien tuer ; le chapelain faisait des prières extraordinaires ; Amélie n’osait plus rire ni causer, et la chanoinesse, pâle et affaiblie, distraite des soins domestiques, et oublieuse de son ouvrage en tapisserie, égrenait son chapelet du matin au soir, entretenait de petites bougies devant l’image de la Vierge, et semblait plus voûtée d’un pied qu’à son ordinaire.

Consuelo se hasarda à proposer une grande et scrupuleuse exploration du Schreckenstein, avoua les recherches qu’elle y avait faites, et confia en particulier à la chanoinesse la circonstance de la feuille de rose, et le soin qu’elle avait mis à examiner toute la nuit le sommet lumineux de la montagne. Mais les dispositions que voulait prendre Wenceslawa pour cette exploration, firent bientôt repentir Consuelo de son épanchement. La chanoinesse voulait qu’on s’assurât de la personne de Zdenko, qu’on l’effrayât par des menaces, qu’on fît armer cinquante hommes de torches et de fusils, enfin que le chapelain prononçât sur la pierre fatale ses plus terribles exorcismes, tandis que le baron, suivi de Hanz, et de ses plus courageux acolytes, ferait en règle, au milieu de la nuit, le siège du Schreckenstein. C’était le vrai moyen de porter Albert à la folie la plus extrême, et peut-être à la fureur, que de lui procurer une surprise de ce genre ; et Consuelo obtint, à force de représentations et de prières, que Wenceslawa n’agirait point et n’entreprendrait rien sans son avis. Or, voici quel parti elle lui proposa en définitive : ce fut de sortir du château la nuit suivante, et d’aller seule avec la chanoinesse, en se faisant suivre à distance de Hanz et du chapelain seulement, examiner de près le feu du Schreckenstein. Mais cette résolution se trouva au-dessus des forces de la chanoinesse. Elle était persuadée que le sabbat officiait sur la pierre d’épouvante, et tout ce que Consuelo put obtenir fut qu’on lui ouvrirait les portes à minuit et que le baron et quelques autres personnes de bonne volonté la suivraient sans armes et dans le plus grand silence. Il fut convenu qu’on cacherait cette tentative au comte Christian, dont le grand âge et la santé affaiblie ne pourraient se prêter à une pareille course durant la nuit froide et malsaine, et qui cependant voudrait s’y associer s’il en avait connaissance.

Tout fut exécuté ainsi que Consuelo l’avait désiré. Le baron, le chapelain et Hanz l’accompagnèrent. Elle s’avança seule, à cent pas de son escorte, et monta sur le Schreckenstein avec un courage digne de Bradamante. Mais à mesure qu’elle approchait, la lueur qui lui paraissait sortir en rayonnant des fissures de la roche culminante s’éteignit peu à peu, et lorsqu’elle y fut arrivée, une profonde obscurité enveloppait la montagne du sommet à la base. Un profond silence et l’horreur de la solitude régnaient partout. Elle appela Zdenko, Cynabre, et même Albert, quoiqu’en tremblant. Tout fut muet, et l’écho seul lui renvoya le son de sa voix mal assurée.

Elle revint découragée vers ses guides. Ils vantèrent beaucoup son courage, et osèrent, après elle, explorer encore les lieux qu’elle venait de quitter, mais sans succès ; et tous rentrèrent en silence au château, où la chanoinesse, qui les attendait sur le seuil, vit, à leur récit, s’évanouir sa dernière espérance.