Colloque Sentimental entre Émile Zola et Fagus/LXXXI

Société libre d’édition des gens de lettres (p. 79).

LXXXI

DOMINICALE TIERCE


Les murs sont fleuris comme des ulcères
D’une éruption surmulticolore
Jean-Jean Peuple-Roi en lui-même insère
Leurs exhalaisons puamment sonores ;

Végétation par trop estivale,
Plaques bubonant d’où le pus suinte,
Et que l’électeur goulument avale
Dans leurs mots visqueux, chapelets d’helminthes :

Vite évadons-nous aux campagnes molles
Où l’on s’enfouit dans l’herbe odorante,
Nous sentir draper, immense auréole,
Nature, de ton haleine géante ;

Profitons surtout du répit qui reste :
Les prairies bientôt ne seront plus sûres,
On y risquera rencontres funestes ;
Ces bois dresseront gueules et morsures,

Des gros Perlouviers sauteront dans l’herbe,
Des poissons glaireux nageront en Seine,
Des poilus Sarceys, gluants de proverbes,
Nous injecteront leurs baves malsaines,

Des Barrès sifflants mordront nos Mélines,
Des Esterhazys enragés, sans nombre
Courront… à nos pieds pendront par tartines,
Drumont, Rochefort, déposés dans l’ombre !

15 mai 1898.