Clef de Cleon


Cleon
le C.
Inciolino
joli conin
vicaire
le doigt du milieu
Per ministre
la tête
Nasirola
la Raison
Mentegiu
le Jugement
Demichois
Godmichis
Poncetti
petit C.
Dieu de Lampsaque
Priape
Fervieto
v. de fer
Caſsone
conaſse
Tramneo
matrone
Muta
Deesse du silence.
Stafievo
tout défait.
Passeruti
v. paſsé
Biladure
v. durable
Mutolite
v. molet
Rubego
Bougre
Maia
mere de Mercure

AVERTISSEMENT

DU
TRADUCTEUR.

CE livret, pour être entendu de bien des gens qui ne feront nulle réflexion au titre, auroit eu beſoin d’une Préface ; je n’en ferai cependant point : la plûpart imaginent que c’eſt un froid étalage des peines qu’on a priſes, ou d’ennuieuſes excuſes des fautes qu’on a faites ; ils ne la liroient pas. Ce n’eſt donc qu’au petit nombre des Lecteurs attentifs que cet avertiſſement eſt adreſſé : plus équitables ſans doute, ils ne trouveront pas étrange que je faſſe une légère mention du ſoin que j’ai pris pour conſerver les beautés de l’Original, & de la crainte où je ſuis de n’avoir pas réuſſi.

Je me ſuis plus attaché à l’idée de l’Auteur qu’à la hardieſſe des figures dont il s’eſt ſervi pour l’exprimer. Je ſçai qu’une penſée n’eſt belle qu’autant qu’elle eſt juſte ; que la manière d’écrire la plus naturelle eſt la meilleure, & qu’on ne s’écarte de la noble ſimplicité des Anciens, que par foibleſſe de génie ; c’eſt ce qui m’a fait négliger les jeux de mots, les pointes, les quolibets, & tous les Concetti dont notre Apologiſte eſt plein, ſuivant le goût des meilleurs Ecrivains de ſa Nation.

Au riſque de le défigurer tout-à-fait, je n’ai imité ſon ſtile que de fort loin. On donne dans le faux quand on affecte le brillant : on ne peut éviter l’enflûre quand on veut s’élever au pompeux.

La Langue Italienne reſſemble à une coquette fardée, qui veut plaire à force de pompons, & de petites mignardiſes ; la nôtre eſt une beauté ſage & modeſte, qui plaît ſans le vouloir, & dont les graces naturelles font le principal ornement. Quelle témérité ſeroit-ce de leur prêter le même langage ! auſſi ne l’ai-je pas fait ; mais il falloit en avertir.

Je n’ai point lû le opere burleſche di M. Franceſco Berni, di M. Gio della Caſa, del Varchi, del Mauro, di M. Bino, del Molſa, del Bolce & del Firenzuola ; imprimées à Florence en 1548, le Boccalini m’aprend ſeulement que ſous l’allégorie du four, des figues, & de la fêve, Jean de la Caſe, le Molſa, & le Mauro, dans leurs Capitoli, ont décrit en vers le commerce ſecret dont Cleon fait l’hiſtoire en proſe : peut-être eſt-ce la moitié du livre d’Antoine Panormita, dont le manuſcrit a été long-tems dans la Bibliotéque du Grand Duc.

Que l’Auteur de cette Apologie prétendue ſoit mâle ou femelle, il n’importe : quoique l’un ſoit plus probable que l’autre, l’alternative eſt indifférente ; quel qu’il ſoit, il a une parfaite connoiſſance des Poëtes & des bons Hiſtoriens, à ce qu’il m’a ſemblé.

Il lui arrive quelquefois d’employer dans la même phraſe des métaphores tirées du négoce, du pélerinage & de la dévotion. La confuſion de ces différentes figures rélatives au même objet, ne peut manquer de répandre l’obſcurité dans pluſieurs endroits de la narration, qui ne ſe trouveroit pas mal d’un Commentaire ; mais ne faut-il rien laiſſer à deviner au Lecteur ? ce ſeroit trop ſe défier de ſa pénétration que de vouloir tout éclaircir.

Je n’ai pas jugé à propos de traduire le titre des trois parties de l’hiſtoire de Cléon, ni les noms propres qui s’y rencontrent, ſoit parce que leurs ſignifications n’ont qu’un raport trés-éloigné au ſujet, ſoit parce que la tranſpoſition & le derangement des lettres dans pluſieurs, m’ont ſemblés renfermer quelque fineſſe que j’abandonne aux Anagrammatiſtes, comme aux amateurs de ces pénibles misères.

Il y a deux cens ans que ces ſortes d’allégories étoient fort à la mode. Malgré le mauvais état du manuſcrit, & les lacunes qui s’y trouvent, je ne crois pas cet ouvrage auſſi âgé. Si l’Auteur les y a laiſſées pour lui donner un air d’antiquité, je n’ai pas tout-à-fait ſecondé ſon deſſein, car j’ai pris la liberté de les remplir toutes, à l’exception d’une ſeule. Cette ſupercherie eſt ſi uſée !

Reſte à prévenir les reproches qu’on pourroit me faire d’en avoir donné la Traduction. Indépendamment du goût du ſiécle, de la licence qui y régne, & de l’exemple des plus grands hommes qui ont écrit ſur de pareilles matières avec moins de ménagement ; ſi l’on remarque comme on le doit, qu’il contient moins une apologie qu’une ſatyre du vice, ſouvent malheureux & toujours mépriſé, je n’aurai rien à craindre.