N. S. Hardy, Libraire-éditeurs (p. 94-125).


LE CHIEN

CANIS FAMILIARIS



Le comte de Buffon a consacré de bien belles pages à la description du chien : la nature lui a, en effet, fait don de précieuses qualités : élégance de forme, force, vivacité, vitesse, légèreté, odorat exquis, courage, intelligence, naturel affectueux, fidélité, dévouement sans borne.

« Le chien, dit Blaze, est sans contredit l’animal qui montre le plus de dévouement à l’homme. Il s’attache à son maître, lui consacre sa vie, garde sa maison, veille sur son troupeau qu’il fait manœuvrer en général habile ; il guide les aveugles, ramène les voyageurs égarés dans la neige, et sauve les naufragés. Le chien est un excellent ami ; si vous causez ensemble, il vous comprendra fort bien et saura vous répondre. Le chien est le plus fidèle, le plus intelligent, le plus courageux des animaux ; il reconnaît son maître à sa voix, au bruit de ses pas et le sent de fort loin. Il flatte les amis de la maison et grogne à l’arrivée d’un inconnu. S’il fait un long voyage, il se souvient du chemin ; il pleure son maître mort et l’accompagne au tombeau. S’il faut le défendre contre plusieurs ennemis, il ne les comptera jamais : il se lancera dans la mêlée, mordra partout, tiendra tête à tous ; nul danger ne l’intimidera. » [1]

Nous avons nommé l’épagneul, le mâtin, le chien de berger, le dogue, le roquet, le Saint-Bernard, le Terre-Neuve, etc.

Le chien est une race distincte ; le loup et le renard sont les deux animaux sauvages qui, par leur conformation extérieure ressemble le plus au chien ; le produit de l’accouplement des loups et des chiens, n’est pas un chien proprement dit ; d’après Buffon,[2] malgré d’intéressantes expériences poussées par lui, en 1776, jusqu’à la cinquième génération, entre une louve et un chien, et leurs écrois, le caractère féroce, intraitable, sanguinaire de la louve continua de se manifester jusqu’au bout parmi ses farouches descendants. Les chiens domestiques fuyaient la présence de ces métis, lesquels, émettaient comme les loups une odeur particulière.

Qui alors nous expliquera l’origine de nos chiens esquimaux, lesquels hurlent, mais n’aboient point, ont les oreilles droites, pointues, la couleur, la taille, la dégaine du loup, sa voracité[3] pour la chair crue de la volaille et souvent sa férocité. Rien de plus lugubre, nous disent les voyageurs, que d’entendre, pendant le silence des nuits, sur la plage glacée, inhospitalière du Labrador, les chiens esquimaux hurleur — réunis en bande — [4] affamés et prêts à dévorer homme ou bête qui s’aventurerait sans défense parmi eux ! On les nomme Chiens-Loups, Wolf-Dogs. De même que l’on désigne comme chiens sauvages Indian Dogs, ces intelligents caniches à poil ras, à nez effilé, à oreilles droites, de couleur généralement fauve, avec pieds et museau noirs, que les Indiens employant pour traquer les lièvres et faire brancher les perdrix. Des chiens sauvages, plus ou moins grands de taille, existaient en Amérique, à sa découverte. (Il en existe encore, tel que l’Aguara dans l’Amérique du sud.) Les aborigènes en faisaient des rôtis et des consommés : le frère Sagard faute d’autres mets, les pouvait d’une digestion facile et de goût approchant de la chair du porc !

Le chien transporté de la zone tempérée à la zone torride, s’abâtardit ; mais il peut endurer même le froid arctique.

La race de ces chiens énormes, qui, au dire de Pline, ne reculaient pas en présence de lions ou même d’éléphants, semble avoir disparu : on les nommait chiens d’Épire, chiens de l’Albanie. Au siècle dernier on parlait beaucoup des énormes spécimens de la race canine de la Tartarie, de l’Albanie, du nord de la Grèce, du Danemark, de l’Irlande, comme les plus forts, les plus puissants de tous les chiens. L’antique Irish Wolfhound a disparu des montagnes de la Verte Erin. On rencontre encore dans le nord de l’Europe le Grand danois, mais il est bien rare : et les bons religieux des Alpes, malgré de terribles échecs, ont réussi à conserver leur superbe race de chiens qui descendent, peut-être, des puissants mâtins de l’Albanie — Albanian Mastifs.

Buffon dit avoir vu en France, un chien qui lui parut avoir, tout assis, près de cinq pieds de hauteur et ressembler au grand danois bien qu’il en différât par l’énormité de la taille, il était tout blanc et d’un naturel doux et tranquille.

Le Cuban Bloodhound, mâtin de l’île de Cuba, et le Saint-Bernard, sont les deux plus grandes espèces que nous ayons vues récemment en Amérique.

Au rapport de Buffon, le chien de berger, le Colley, peut être considéré comme le vrai chien de nature et la souche ou tige commune de toutes les autres races.

« Les ossements découverts par M. Bourguignat dans une couche des cavernes Fontaine et de la Siagne (Alpes-Maritimes) qui appartient à la phase trizoïque de la période quaternaire, appartient à deux types : le chien de berger et le dogue de grande taille. Ceux trouvés à Nove, près de Vence, et aux Clapiers, près de Grasse (Alpes-Maritimes) dans une couche de la phase ontozoïque, qui suit la précédente, sont les débris du basset, du chien courant du chien d’arrêt, et du chien de berger. » — (Barreyre.)

Le Colley transporté dans les climats rigoureux du nord, s’est enlaidi et rapetissé chez les Lapons, et paraît s’être maintenu et même perfectionné en Islande, en Russie, en Sibérie, dont le climat est moins rigoureux, et où les peuples sont un peu plus civilisés.

Voici une page que nous transcrivons sous toutes réserves.

« Le mâtin, transporté au Nord, est devenu grand danois, et transporté au Midi, est devenu lévrier. Les grands lévriers viennent du Levant ; ceux de taille médiocre, d’Italie (Italian Greyhound), et ces lévriers d’Italie, transportés en Angleterre sont devenus lévrons, c’est-à-dire lévriers encore plus petits. (English Greyhound).

Le grand danois transporté en Irlande dans l’Ukraine, en Tartarie, en Épire, dans l’Albanie, est devenu le grand chien d’Irlande (Great Irish Wolfhound), et c’est le plus grand de tous les chiens.

Le dogue (Bull dog), introduit d’Angleterre en Danemark, est devenu petit danois ; et ce même petit danois transporté dans les climats chauds, est devenu chien-turc. Toutes ces races avec leurs variétés, n’ont été produites que par l’influence du climat, jointe à la douceur de l’abri, à l’effet de la nourriture et au résultat d’une éducation soignée. Les autres chiens ne sont pas de race pure et proviennent du mélange de ces premières races.

L’ami de l’homme, le chien, devient chaque année de plus en plus un être choyé, prisé, privilégié même. On enregistre la généalogie des Alexandre et des Napoléon de l’espèce, dans le Livre d’or des clubs et des chenils, avec la même exactitude que celle des fils et des filles de Godolphin, d’Eclipse, de Flying Dutchman, de Gladiateur et autres coursiers remarquables du vieux monde.


« Les expositions de chiens, dit Benedict-Henry Revoil, ont d’origine anglaise :

« La première grande exposition de chiens que l’on cite, en Angleterre, eut lien à Birmingham en 1860… La seconde, eut lieu en 1861, à Leeds, patronnée par les comtes de Derby, Grey, Grosvenor, Ripou, Lord Neville, Lord Paget, le duc de Northumberland, le duc de Carlisle…

La première exposition de chiens, en France, date de 1863. Elle fut ouverte le 3 de mai, au jardin zoologique d’acclimatation au bois de Boulogne. Parmi les patrons et membres du jury, on lit les noms de M. M. Drouyn de l’Huys, le baron James de Rothschild, de Quatre-Fages le comte d’Epremesnil ; le prince de Wagram, le vicomte de Larochefoucauld, Albert Geoffroy Saint Hilaire.

D’autres hommes distingués y prirent part, tels que le vicomte Paul Daru, le duc de Plaisance, le baron Lambert, le comte de Carrayon-Latour, le docteur Vernois, Paul Geruzez, le comte Henry Greffulhe, Mackenzie Grieves, le comte Henry de l’Aigle, le vicomte de Grente, le vicomte de Boisgelin, le comte de Chézelled, le baron de Noirmont, le baron Le Coulteulx de Canteleu, le duc de Beaufort et alii.

Il y a des chenils célèbres dans chaque grande ville, aux États-Unis, où sont offerts en vente des Saint-Bernard, des Mâtins, des Dogues, des Pointers, des Setters, des Retrievers, des Épagneuls, des Terriers, des Collies, des Pugs, de bonne race : on en a vu se vendre de $100 à $1,000.[5] $15 représente le coût d’un chien ordinaire. Les expositions annuelles de la race canine aux États-Unis, ont grandement contribué à son amélioration

Il est permis de croire que la célèbre exposition de chien de race, à Ottawa en 1883, sous les auspices du gouverneur général, le marquis de Lorne, a produit d’excellents résultats.

Chaque semaine, les grandes Revues du sport chez nos voisins, Forest and Stream & Outing, etc., enregistrent les concours ou « fieldtrials qui ont pour but de désigner les sujets les plus aptes à perpétuer la pureté du sang et les qualités qui distinguent les races », la liste des prix, les noms des compétiteurs heureux, aussi bien que les ventes des chiens de race aux chenils les plus en renom.

« En Allemagne, en Belgique, en Hollande, comme en Angleterre le vent souffle avec persistance, aux expositions canines (Barreyre).


LES CHIENS DE CHASSE

DE L’ANTIQUITÉ


« Les peuples de l’antiquité qui ont rendu le plus éclatant hommage au mérite de la race canine, sont les Égyptiens. Il voulaient leur élever des temples en récompense des services que les chiens leurs rendaient sur les rives du Nil. Les bas-reliefs et les sculptures Égyptiennes, au Musée Britannique révèlent deux variétés distinctes : l’une, un grand levrier taché de blanc et de noir, ou jaune ; l’autre, un petit chien ressemblant à notre terrier, notre rattier.

Les princes Assyriens n’avaient pour armes dans les battues royales, que l’arc, la flèche et la lance, et pour protéger leur personne, des chiens monstrueux et féroces, ressemblant au mâtins du Thibet, lesquels se ruaient sur les lions et les tigres, à la suite des rabatteurs.

Le fameux chien Molosse, mentionné par Pline — offert en présent, à Alexandre-le-Grand, par le roi d’Albanie, appartenait probablement à cette race gigantesque.

Ce chien lancé sur des ours, des sangliers, des cerfs, refusa de se mesurer avec eux. Le monarque indigné, le fit tuer : ce qu’ayant ouï le roi de l’Albanie, il fit don à son royal confrère, d’un second chien, lui recommandant de le confronter avec des antagonistes dignes de lui. Alexandre fit relâcher un lion : quelques moments plus tard, ce monarque des forêts succombait, le dos broyé. On confronta le chien ensuite avec un éléphant ; le grand chien après l’avoir harcelé d’incessantes morsures, en vint à bout : bientôt le colosse s’abattit et la terre trembla sous son poids, à la vive satisfaction du roi de Macedoine.

Longtemps avant que Bismarck et Boulanger eussent songé à employer des chiens, dans l’armée, le roi des Garamantes, revenant de l’exil, ramena avec lui deux cents chiens, qu’il gardait pour se défendre de ses ennemis.

Le peuple de Colonophon et de Costaboh, maintenait, au dire de Pline, des troupes de chiens pour combattre au premier rang de l’armée, et jamais, parait-il, ils ne tournèrent le dos pour fuir : alliés fidèles, leur solde ne consistait que dans leurs rations de chaque jour.

Les grands chiens-loups, les levriers et une petite espèce ressemblante aux épagneuls, sont ceux que l’on trouve d’ordinaire reproduits dans les sculptures grecques.

Argos, le fidèle compagnon d’Ulysse, est figuré sous les traits d’un énorme chien de chasse, à tête effilée, au nez quarré, à queue recourbée.

Homère décrit les chiens de son temps, ramassant les miettes autour des tables, aux banquets.

On voit encore, à l’entrée de la salle dite Sala degli animali, au Vatican, des chiens Molosses sculptés dans le salon Grec-Romain. Au musée Britannique, les chiens de l’infortuné chasseur Actéon, au moment de l’attaquer, sont sculptés sur une statuette, comme des Chiens-loups. — (Forest & Stream) p. 52, Feby 10, 1887.

LES CHIENS CÉLÈBRES



Benedict-Henry Revoil, résume avec entrain l’historique des chiens célèbres :

« Le chien a été dans tous les temps un objet de considération de la part des hommes. L’Ancien Testament indique le chien de Tobie qui, quoique aveugle, reconnut son maître. Dans la mythologie nous voyons le chien jouer un grand rôle ; car on le sacrifiait à Mars et à Mercure, à Pan et à Esculape, à Hécate et à d’autres divinités. Il était le compagnon de Diane et l’attribut des lares.

Les Égyptiens de l’antiquité, dont les dieux croissaient au milieu de leurs jardins, les Égyptiens qui adoraient l’ognon et l’ail, professaient aussi pour le chien un respect idolâtre. Ils pleuraient chacun de ceux qui mouraient et l’enterraient en grande pompe.

Hérodote rapporte que le grand Cyrus avait dispensé quatre villes de toute contribution, parce qu’elles avaient spontanément nourri de nombreux chiens royaux.

Alcibiade paya, selon Plutarque, pour un de ses chiens de chasse, la somme énorme pour ce temps-là de sept mille drachmes (environ cinq mille six cent vingt-cinq francs). Bernabo Visconti possédait cinq cents chiens de chasse, qui étaient nourris par les couvents de Bologne et des environs.

À Gênes, dans le jardin du palais Doria, on voit un magnifique mausolée en marbre, élevé à la mémoire d’un chien qui fut le favori du brave marin André Doria. Ce chien décédé en 1605 reçut pendant toute la durée de sa vie, du roi Philippe II, d’Espagne une pension annuelle de cinq cents ducats d’or. Il, — le chien, était servi par deux esclaves, qui lui apportaient sa pitance dans des plats d’argent.

Fréderic-le-Grand fit élever un monument semblable, dans le jardin de Sans-Souci, à sa chienne bien-aimée Alcmene. Une autre chienne, Biche, qui était tombée aux mains des Autrichiens, à la bataille de Soor, en 1745, lui fut rendue, sur ses instantes prières, par le général Kadasdi. Le philosophe de Sans-Souci était, du reste, un grand amateur de chiens : certain jour, ne dit-il pas au marquis d’Argens : « J’aime tous les chiens, excepté les Autrichiens. » À Voltaire, qui ne pouvait comprendre sa prédilection pour les chiens, Frédéric se plaisait à citer le peuple molosse, qui faisait à ses chiens de splendides funérailles ; les Agrigentins, qui élevaient, en l’honneur des chiens, des statues commémoratives avec inscriptions ; Alexandre le Grand qui en l’honneur d’un chien mort, avait construit une ville ; l’empereur Adrien, qui, en mémoire de sa chienne décédée, ordonna de grands banquets le jour des funérailles ; et Serge, qui, en souvenir de son chien Arzebour, dévoré par les loups, avait décrété un jour de jeûne général dans son royaume. Les chiens ont toujours eu leur place dans les palais des souverains.

Le levrier de Charles IX est historique.

Henri III raffolait des caniches.

Le roi Charles XII de Suède fit enterrer solennellement son chien favori Pompe et composer pour lui des poésies et des épitaphes.

L’impératrice Catherine II de Russie aimait aussi son épagneul Rogerson au-delà de tout, et, après sa mort, elle composa à son sujet un épitaphe en français.

Mais ce n’est pas seulement parmi les têtes couronnées qu’il y a eu de grands amateurs de chiens : les savants et les poëtes en comptent aussi un nombre considérable.

Le célèbre cardinal Pietro Bembo possédait un chien dont la mort l’affligea profondément.

Le philosophe, astrologue et alchimiste Corneille Agrippa de Nettesheim avait jour et nuit près de lui un chien qui reposait sur ses pieds et passait aux yeux des gens superstitieux pour un diable déguisé.

Le savant Juste Lipse, avait trois chiens qui s’appelaient Mops, Moplurus et Saplurus : il les aimait au point qu’il fit peindre chacun d’eux à part et qu’il leur dédia des poëmes à tous trois. Le dernier, qu’il chérissait plus tendrement, étant tombé dans un vase d’eau bouillante, Lipse écrivit à son ami Philippe Rubens : Tristis hæc scribo et juxta lacrymas, non rideo. Saplurus meus obiit et id violentâ morte. On voit, à la bibliothèque de l’université de Jéna, le portrait de Juste Lipse peint avec un chien dans les bras.

Le fameux jésuite Maimbourg était un amateur si passionné des chiens, qu’un jour il prit ces animaux pour sujet d’un sermon, dans lequel il décrivit exactement le chien du roi David, et compara les dogues anglais aux jansénistes, les mâtins aux trappistes et les vigilants chiens de garde aux jésuites.

Un autre révérend, le père du Cerceau, qui écrivit la vie de Rienzi, a aussi chanté son chien Mirtille.

Paul Scarron dédia un de ses romans comiques au petit bichon de sa sœur, auquel il avait donné le nom de Guillemette. Lorsqu’il se brouilla avec sa famille, il eut la méchanceté de mettre dans la seconde édition parmi les errata de la première : Au lieu de, la chienne de ma sœur, lisez : ma chienne de sœur.

Bruzen de la Martinière dédia la seconde partie de ses Entretiens des Ombres aux Champs Élysées au chien favori du libraire Uytiners, d’Amsterdam.

Un poëte anglais, Swift, si je ne me trompe, fit hommage d’un de ses ouvrages à son petit epagneul.

Le roi Henri IV, le modèle des souverains français, aimait fort les chiens, ce qui prouvait sa bonté. Devenu roi de France, le Béarnais, qui possédait un « toutou » chérie, nommé Fanor, l’envoya à Dieppe pour y prendre les bains de mer, ce qui créa historiquement la réputation thérapeutique des bains Dieppais. Il paraît que Fanor, maigre roquet, si l’on en croit la chronique avait pensé que la favori du roi son maître lui permettait de chercher impunément noise à un mâtin de race très-roturière et fort peu endurant. Le roquet du roi fut honteusement houspillé, et apprit à ses dépens qu’un titre honorifique ne donne pas droit d’insolence.

Henri IV envoya Fanor à Dieppe pour guérir ses blessures dans l’eau salée. Le gouverneur de la ville, Charles-Timoléon de Beaux-Ongles, seigneur de Sygognes, offrit au blessé des festins de Balthazar, et gagna ainsi la faveur d’Henri IV, qui disait très sérieusement.

— Qui m’ayme ayme mon chien.

Le roi Charles X avait pour ses meutes une considération toute particulière, dont un volume précieux, le Livret des Chasses royales de 1828, fait mention.

Madame Deshoulières composa une tragédie sur la mort du chien favori de son ami (la mort de cochon, chien de M. le Marquis de Vivonne, Amsterdam, 1709).

Une duchesse française prit le deuil à la suite de la mort de son chien et reçut les compliments de condoléance de ses amis.

Un comte de Clermont porta également le deuil de son chien Citron, et chargea son aumônier de composer une épitaphe pour le défunt. Cette épitaphe, la voici :

Ci-gît Citron qui, sans peut-être
Avait plus de sens que… son maître

Une comtesse autrichienne élevait toute une armée de petits griffons, et, lorsqu’un d’eux mourait, elle faisait dire une messe.

La princesse Anne de Wurtemburg, qui vivait en 1733, a Mœmpelgard faisait ensevelir ses chiens dans des cercueils de plomb…

Newton avait un épagneul qu’il aimait beaucoup. Un jour, il le laissa seul dans son cabinet, et Diamant renversa, en jouant, une bougie qui consuma les calculs auxquels le savant avait consacré une partie de sa vie. Cette perte était irréparable. Newton se contenta de pousser un soupir, et dit tranquillement à son chien.

Diamant, tu ne te doutes pas du tort que tu m’as fait.

Alphonse Karr a eu Freischütz, qui le mangeait un peu, et notre grand poëte Lamartine est entouré de lévriers splendides.

Mon illustre ami Alexandre Dumas a eu de nombreux chiens autour de lui dont il a raconté les faits et gestes dans cet amusant récit intitulé : Histoire de mes bêtes.

Alexandre II, Empereur de Russie avait son admirable setter, noir jais, my lord.

Napoléon III avait aussi son dernier favori Nero, au poil noir, à l’œil intelligent, l’ami intime de Brucker, le chien du maréchal Vaillant.

« En aucun lieu du monde, ajoute Revoil, on ne trouve d’aussi beaux chiens qu’en Angleterre. Le palais des chiens du duc de Richmond, a coûté, dit-on, vingt mille livres sterling, et celui du duc de Bedford, soixante-dix mille. »


Parmi les chiens célèbres, il ne faut pas oublier Argos, le vieux chien aveugle qui reconnaît Ulysse, son maître après vingt années d’absence et qui tente un dernier effort pour venir lui lécher la main : Boatswain, l’intrépide Terre-Neuve de Byron, auquel il consacra l’épitaphe si connue : les nombreux chiens de Sir Walter Scott, Maïda, Camp, Bevis et sa meute de Peppers et de Mustards ; Burns avait aussi comme Alcibiade, un chien favori, peut-être deux.

J’ai consacré une étude spéciale[6], aux chiens historiques du Canada : [7] Matelot, le chien de Champlain peut-être ? [8] Pilote, la chienne du Père Lallemant, célèbre dans les fastes de Ville-Marie, en 1647 : [9] les « douze gros chiens » de garde des Révérendes Dames Ursulines de Québec, sentinelles incorruptibles, aux aguets la nuit et le jour, contre les Iroquois ; [10] les dogues féroces du Baron Robineau de Portneuf, le « Chien d’or » de Kirby ; Montgomery, le chien du malencontreux héros de Près-de-Ville, en 1775, [11] Niger ; le superbe Colley, laissé par Lord Dorchester, en 1796, au père de l’auteur des Anciens Canadiens, P. A. De Gaspé ; Cabot, le magnifique Terre-Neuve, présenté au Prince de Galles, à son arrivée en cette colonie, en 1860. Wolfe, le colossal Saint-Bernard, qui me fut offert en don la même année, un des plus beaux spécimens que j’ai encore vus ; sans oublier Vaillant, le fidèle compagnon de mon[12] ami L. H. Fréchette, qui l’a si bien chanté.

Alexandre Dumas, a glissé une anecdote qui en vaut la peine, sur l’origine de l’accolade, ou « poignée de mains » que se donne les chiens, dans la préface du superbe volume sur les chiens, écrit par Bénédict-Henry Revoil.







CHIENS DE CHASSE


Le bon chien fuit le bon chasseur.
Le bon chasseur fait le bon chien.


En Canada, la chasse à la Bécassine et à la Bécasse se fait avec trois espèces de chiens : ces espèces bien que le produit de mélanges de races, à une époque reculée, sont devenues des races distinctes : le Pointer, le Setter et le Cocker spaniel.

LE POINTER

Mon chien bondit, s’écarte et suit avec ardeur.
L’oiseau dont les zéphirs vont lui porter l’odeur.
Il s’approche, il le voit, transporté, mais docile,
Il me regarde alors et demeure immobile.
J’avance, l’oiseau part, le plomb que l’œil conduit,
Le frappe dans les airs au moment qu’il s’enfuit
Saint-Lambert.


Le pointer, n’est pas de race aussi ancienne que le setter. Il fut amené en France, par des officiers anglais pendant l’invasion de 1814 et 1815. On le possédait en Angleterre peut-être un demi siècle avant.[13] Il se nommait d’abord Spanish Pointer — Pointer d’Espagne, parceque le croisage des races qui le produisit semble avoir eu lieu d’abord en ce pays, où sa vigueur et son entrain le rendirent précieux pour l’exercice ardue de la chasse, dans des plaines arides et souvent sans eau. On le considère un croisé entre le Foxhound ou le lévrier (Greyhound) et l’Épagneul — ou entre l’Épagneul et le lévrier Danois. On ne doit jamais, quoiqu’on en dise, le croiser avec le setter. Cependant j’ai connu des Métis d’une rare sagacité. Le métis entre le pointer et le setter se nomme dropper ; j’ai connu des dropper à Québec, d’une rare sagacité ; les formes athlétiques du pointer prédominent généralement chez les dropper ; l’on affirme qu’ils sont incertains dans leurs chasses et que leurs écrois dégénèrent à la seconde génération.

Le pointer est âpre, ardent, batailleur même ; il typifie les deux ordres que les vieux livres désignent comme Sagaces et Pugnaces.

S’il n’a pas la vitesse merveilleuse du setter, il est plus dur à la misère, souffre bien moins de la soif ; on peut même l’employer dans les plaines où le manque d’eau potable rendrait le setter inutile. Il chasse à ravir dans les lieux découverts ; mais il n’aime pas les fourrés, le grand bois, bien qu’on réussit souvent à vaincre, en cela, sa répugnance ; il ne prend l’eau qu’à contre-cœur. Pour le jeune Actéon des villes, qui ne peut se permettre que trois ou quatre parties de chasse par saison, le pointer est préférable. Une fois dressé, il reste dressé ; tandis que le setter requiert souvent une nouvelle leçon à chaque partie de chasse, à moins de chasser constamment.

Le pointer n’a pas le naturel affectueux du setter : il pointera aussi bien pour un étranger que pour son maître. Il chasse en un mot pour son propre compte ; mais il ne tolère pas toujours la maladresse chez le chasseur. Sir Walter Scott se plaisait à rappeler une anecdote à propos d’un vieux pointer qu’il avait prêté à son ami, le comédien, Daniel Terry. Terry fit lever une couvée entière de perdreaux et lâcha ses deux coups de feu sans rien tuer. Le chien se retourna, le toisa de haut en bas ; puis, il continua de pointer. Terry eut une seconde mésaventure semblable : l’animal, baissa la queue, leva la patte de derrière… puis, quitta de suite le malencontreux chasseur. « Le pointer est infatigable ; l’ardeur de la poursuite lui fait tout oublier. Tous les chiens quand ils ont soif, se précipitent dans l’eau qu’ils rencontrent ; le pointer quand il est lancé, n’y fait pas attention ; il craint de perdre un seul instant. C’est au maître à veiller sur le chien. Il part au galop, prend le vent, court en tout sens et tombe en arrêt. Vous êtes à mille pas de lui, qu’importe ! Son arrêt est si ferme, que vous avez le temps d’arriver » au son de sa clochette.

Blain, écrivain distingué, reconnaît quatre variétés de pointers : le pointer Anglais, celui d’Espagne, celui de Russie, celui de France.[14] Youatt ajoute une cinquième le pointer Portugais, race inférieure, dit-il, sous bien des rapports.

Le temps fut où le pointer d’Espagne, était fort prisé, en sa terre natale, aussi bien qu’à l’étranger, pour sa force, son fin nez etc. ; mais ses formes grossières, son caractère hargneux, son appétit vorace le firent bientôt tomber en discrédit.

Heureusement qu’on avait songé à le croiser avec le Foxhound ou lévrier à renard ; ses écrois furent réputés les égaux des pointers anglais, en vigueur, en vitesse et pour le flair. Blain mentionne un de ces chiens — la propriété du Col. Thornton — qui fut vendu ou échangé pour cent louis valant de vin de Champagne et de Bourgogne, une tonne de vin de Bordeaux, un fusil de chasse de valeur et un pointer.

Le pointer de Russie, peu connu en ce pays, mériterait de l’être davantage, au rapport de Frank Forester ; sa forte taille, son poil long et rude, le rendent insensible au froid du Canada ; il n’est certes pas beau à voir, mais on en parle très avantageusement. Le pointer de France, bien moins grand que le pointer de Russie ou même le pointer anglais, réunit une foule de bonnes qualités ; mais il est moins vigoureux et à moins de vitesse que le pointer anglais. Beaudrillard[15] en fait beaucoup d’éloges ; il s’emploie selon lui, dans ce qu’il nomme les grandes chasses.

Les pointers d’Espagne dits « chiens à deux nez » parce qu’ils ont les narines séparées par une gouttière passent pour être inférieurs quant à l’odorat, aux autres races. Stonehenge, Youatt, Lewis donnent la préférence aux pointers anglais. Le point capital pour le chasseur désireux d’acquérir un pointer, est la connaissance personnelle et par des expériences réitérées, de son savoir faire en fourré, ou en plaine. N’achetez donc jamais un pointer simplement d’après la connaissance de sa lignée, l’élégance de ses formes. Bien que nos races de pointers soient parfois, rien moins que pures, nous avons connu des chasseurs expérimentés des vieux pays, Sir George Gore entr’autres, en faire grand cas.






LE SETTER


LE SETTER — CHIEN COUCHANT



Gardant du bienfait seul le doux ressentiment,
Il vient lécher ma main après le châtiment ;
Souvent il me regarde, humide de tendresse,
Son œil affectueux implore une caresse,
J’ordonne, il vient à moi ; je menace, il me fuit ;
Je l’appelle, il revient ; je fais signe, il me suit ;
Je m’éloigne, quels pleurs ! je reviens, quelle joie !
Chasseur sans intérêt, il m’apporte sa proie.
Delille.


Le setter est d’origine plus ancienne que le pointer, Au rapport de Youatt, un grand seigneur en Angleterre, en avait de dressés pour la chasse même en 1335, et l’on pourrait accorder à ce noble écrois de l’épagneul, originaire d’Espagne, un blason encore plus ancien.

On compte trois variétés de setters : le setter d’Angleterre, le setter d’Irlande, le setter d’Écosse, dit Gordon setter, parce que le duc de Gordon possédait les plus beaux. Le pays de Galles en réclame une quatrième variété et prétend même que c’est la souche de la race, bien que les amateurs soient à peu près unanimes à accorder cet honneur à l’Irlande, où les setters ont été moins croisés avec les pointers.

Le setter d’Irlande n’a pas la robe aussi luisante, aussi soyeuse que son confrère des rives de la Tamise. Il n’en a pas aussi les formes élégantes. Il lui est un peu supérieur par la taille et sait supporter encore davantage la fatigue. Ce setter est d’ordinaire, de couleur acajou, ou nuancé de châtain, tandis que le Gordon-setter est noir ; ses jambes, sa gorge sont marqués de feu. Le Laverack, setter est blanc et noir ; c’est une des plus belles variétés ; elle doit sont nom et sa haute renommée à M. Edward Laverack, célèbre éleveur de setter, en Angleterre.

Les fastes de la vénerie aux États-Unis, nous dit M. Lewis, ont enregistré les exploits d’un setter importé d’Irlande, d’un naturel et d’une sagacité sans pareilles ; on eut pu dire de lui qu’il possédait tous les talents, excepté celui de la parole. « Smoke, c’était son nom, donna des preuves réitérées d’une intelligence canine précoce. On l’a vu plus d’une fois laisser sans bruit le gibier, aller quérir son maître, qu’il avait perdu dans le fourré, et, par des signes qui lui était particuliers, le ramener à l’endroit où il avait dépisté la volatile. Plus d’une fois, Smoke a déserté, en silence, la partie de chasse, de dégoût, refusant de chasser pour un amateur dont le coup de fusil portait à faux. Chez Smoke, » les glaces de la vieillesse ne purent ralentir l’ardeur de ses jeunes années ; à l’âge patriarcal pour un chien de chasse, de quatorze ans, il faisait sa partie, une journée entière sans broncher.

« Chez le setter anglais la robe peut revêtir toutes les couleurs. La plus à la mode, est la blanche avec des taches noires (Blue Belton) ou blanche pointillée de noir (Blue Mottled). Le poil peut être épais et ondulé, mais non frisé comme celui de l’épagneul d’eau. Le pied doit être très feutré ; Les Laverack, les Naworth Castle, les Featherstone Castle, les Lord Lovat’s, les Earl of Seafield’s, les Lord Ossulton’s, les Tankerwills’s, les Lort’s et les Lanidloes setters sont plutôt des familles d’English setters que des races particulières » — Beyrere.

Chose singulière, inexplicable peut-être, le setter anglais, même bien dressé, quand il traverse l’océan, change sa manière de chasser : il ne sett pas ; il pointe. La nature du terrain de chasse y serait-elle pour quelque chose ? l’odeur du gibier est moins forte en Amérique, ses habitudes ne sont pas les mêmes ? En Angleterre, le chien chasse dans le découvert, les plaines ; c’est ordinairement le contraire, au moins, pour la bécasse, en Amérique.

Chez le setter, la couleur est tout-à-fait secondaire ; le vrai chien de race est préférable, plutôt petit, que grand de taille ; la tête ne devra être trop effilée, mais un peu ressemblante à celle de l’épagneul et du lévrier ; l’iris foncé, couleur d’acajou, les yeux ronds, à fleur de tête, expressifs, affectueux, pleins d’intelligence ; les oreilles, longues, soyeuses, arrondies, pendantes ; les dents saines, point du tout usées, si vous désirez avoir un chien d’une bonne digestion, capable de mâcher ses aliments avant de les avaler ; le museau, le palais, noirs ou pivelés, semblables à celui de l’épagneul ; la charpente et les côtes arrondies, compactes ; les reins, courts, la poitrine, développée ; la queue portée horizontalement, non retroussée, longue, effilée, fortement frangée en dessous, à la partie que l’on nomme bannière ou panache ; les jambes fortes, musculaires, osseuses ; les pieds longs, durs, fermes, bien munis de touffes de poil aux orteils et aux hanches, etc. Le setter de votre choix devra être vif dans ses mouvements, caressant, traitable, sans être trop craintif. Ces qualités jointes à une éducation soignée, devront vous assurer le plus humble des compagnons, l’ami le plus fidèle.


L’ÉPAGNEUL


Vos un bon chin prèn lou de race.
(Proverbe Provençal.)


Voilà un chien de qualité, à coup sûr, un chien de noble race.

Pour retracer son origine, il nous faudra pénétrer jusque dans les ténèbres du moyen-âge.

Édouard II, d’Angleterre, jeune homme, aimait furieusement la chasse ; il avait trouvé dans le fils d’un noble français, Pierre Gaveston, un camarade toujours prêt à le seconder dans ses écarts de jeunesse. Sous la conduite de ce mauvais garnement, il fit avec lui irruption dans le parc de l’évêque de Chester en recherche de gibier. St-Hubert, a compté en Angleterre d’ardents disciples dans toutes les classes, sans même en excepter la classe des prélats — les corps épiscopaux durent donc payer leur écot… en cerfs égorgés.

Pierre Gaveston fut jeté en prison, exilé. Son royal compagnon de chasse étant monté sur le trône, Pierre Gaveston fut élargi, réhabilité même dans ses prérogatives passées ; … l’on ne dit pas s’il fut fait baron ?

À ces âpres veneurs du quatorzième siècle, comme à ceux qui leur succédèrent, il fallait de bons chiens — des chiens de chasse sûrs, bien dressés ! voilà sans doute ce qui explique comme quoi le Grand Veneur du roi Édouard ii, Guillaume Twety, d’après Strutt, dans un livre depuis retrouvé à la bibliothèque Cotton — le plus ancien traité de chasse en Angleterre — aurait si bien décrit l’art de la vénerie, sous le règne de ce roi, qui fut appelé au trône en 1307. Twety y énumère les diverses espèces de gibier, de chiens, de procédés de chasse. Après avoir signalé pour chaque espèce de chien, son usage particulier, il affirme que l’épagneul s’emploie comme chien couchant, pour découvrir la caille et la perdrix et pour aider au chasseur à la capturer au moyen de filets et de rêts.

Passons du quatorzième siècle au dix-neuvième et voyons la nombreuse descendance de l’épagneul, que réclame le sport en Canada et son caractère distinctif.

L’épagneul, inférieur en stature au setter et au pointer, est plus trapu ; ses jambes sont plus courtes. Il est doué d’une force, d’un courage, d’une persévérance à la poursuite du gibier, qui dégénère presqu’en excès. Son museau est plus petit que celui du setter ; ses yeux plus grands, plus proéminents ; ses oreilles beaucoup plus longues, bouclées, sa robe plus longue, plus frisée ; sa queue touffue, ses jambes frangées de poil jusqu’aux orteils. Les épagneuls n’ont pas de couleur particulière. Il en est qui donnent la préférence à la nuance orange et blanche ; l’épagneul a de grands yeux, luisants, humides, le palais et le nez noirs comme la nuit. Ces chiens sont difficiles à dresser et requièrent beaucoup de patience, de fermeté chez leur maître. On ne s’en sert pas comme chiens couchants ou comme chiens d’arrêt ; leur besogne est de faire lever le gibier. Ils doivent être constamment à dix pas du chasseur, savoir hâter ou retarder leur course, une fois sur la piste du gibier et pouvoir en indiquer la présence soit en aboyant ou en agitant brusquement leur queue touffue. Frank Forester affectionnait surtout le petit Blenheim Spaniel, pour chasser en automne la bécasse, la caille et la gélinotte à fraise, notre perdrix.

L’épagneul des Champs se range en deux groupes : le Springer supérieur de taille et employé dans les grands fourrés ; le Cocker moins grand, usité plus spécialement pour la chasse à la bécasse.

Le Springer comprend une foule de variétés : le Clumber, le Sussex, le Norfolk ; le Cocker est la souche du Devonshire et des variétés Galloises, etc.

Le Sussex race fort prisée est généralement de la couleur de l’or, sans mélange de blanc. Son pelage est ondé, non frisé, luisant, soyeux, fort fourni.

Le Clumber passe pour avoir emprunté son nom au château du duc de Newcastle où la race origina et se maintint pure jusqu’au milieu du dix-neuvième siècle. Sa nuance est jaune citron ; son poil, luisant, soyeux, presque droit.

Le Water Spaniel comprend de nombreuses variétés, tel que le Old English Water Spaniel, deux variétés irlandaises, sans compter celle dite Tweedside.

« L’épagneul d’eau ainsi que l’indique son nom, est un chien à long poil qui sert exclusivement à la chasse au marais ; son poil frisé, de couleur marron foncé, parfois taché d’un peu de blanc, est enduit d’une espèce d’huile, malheureusement assez odorante, qui le soustrait comme la sauvagine, au contact de l’eau. Quand il est de pur sang, il porte sur le sommet de la tête une mèche de poils qui n’est pas sans analogie avec celle que se font souvent les clowns du cirque ; ce qui lui donne une physionomie très spéciale. Il est très intelligent, très obéissant, très fin de nez, très résistant à la fatigue, très ardent et très attaché à son maître. Il convient particulièrement à la chasse aux canards, à la suite desquels, il ne craint pas de plonger sous les glaçons quand ils ont été blessés, et il les rapporte ensuite, comme le plus brillant des retrievers. » (Barreyre.)





LE RETRIEVER



« Les anglais font rarement rapporter leurs chiens d’arrêt, et ce soin est confié au retrievers. Ce dernier chien ne constitue pas, à proprement parler, une race constituée. Il est, généralement, le produit du Terre-Neuve et du setter. Quelques amateurs préfèrent le produit du Terre-Neuve et du pointer ; d’autres y mêlent du Fox-hound, sur ce point la fantaisie se donne pleine carrière. L’essentiel est d’obtenir un chien obéissant, ayant de la propension naturelle au rapport, fin de nez, et quêtant, non pas le nez haut, comme on le demande au chien d’arrêt afin de découvrir de loin, mais, le nez contre terre, pour mieux suivre la piste d’une pièce de gibier blessée, qui se dérobe, et la rapporter ensuite à son maître.

Les retrievers sont divisés en deux classes principales : 1o  Les Wavy-coated, c’est-à-dire à soies longues et plates, de couleur noir. Ce sont les descendants du Terre-Neuve et du setter.

2o  Les Curly-Coated, c’est-à-dire à soies frisées ; ce sont les plus communs, et ils comptent dans leur ascendance, non seulement le Terre-Neuve, mais l’épagneul d’eau, et même le caniche. On prétend que ce sont les plus intelligents. Ceux qui sont admis aux expositions sont toujours de couleur noire ou marron. » — (Barreyre.)

Nous avons nommé les quatre espèces de chiens, les plus usités en Angleterre pour chasser. « Chez les anglais, dit Barreyre, chaque race est introduite dans la spécialité à laquelle ses aptitudes la rendent la plus propre et il n’est pas douteux qu’elle n’arrive, alors, à une perfection de travail qu’on ne peut exiger d’un seul chien, à qui on demande, par exemple, tout à la fois, d’arrêter de près, au bois et de loin, en plaine ; de quêter, le nez haut, quand il s’agit de découvrir le gibier vivant, et de suivre, le nez collé à la voie, la piste d’une pièce blessée qui se dérobe. »

Le pointer devra être réservé pour les lieux découverts, le setter, pour chasser dans les pays couverts et humides les petits cockers, pour les fourrés épais.




  1. M. J. U. Gregory, tout en causant chasse et chiens me glisse à l’oreille la jolie légende qui suit, relativement au rôle du chien vis-à-vis nos premiers parents : « Quand Adam reçut ordre de sortir du Paradis terrestre, il se trouva face à face avec les animaux créés pour lui. Leur aspect inattendu lui causa un grand effroi que le souvenir de sa désobéissance ne fit qu’accroître. À sa vue, le lion, le roi des animaux, se mit à rugir ; l’ours de grogner ; le cheval de hennir ; la panthère bondit de rage ; l’éléphant sonna de sa trompe ; le bœuf beugla d’une manière effroyable ; le loup hurla ; le renard fit entendre des glapissements aigus, le chat, d’horribles miaulements : un sentiment d’horreur semblait s’être emparé de tous les êtres créés. Adam, atterré, se préparait à fuir, à se dérober à leur courroux, quand le chien se traînant affectueusement à ses genoux lui lécha les mains et lui murmura en aboyant ces douces paroles : « Quand tout t’abandonnera, moi je serai ton ami, ton gardien, ton défenseur, ton fidèle serviteur, jusqu’à la fin des temps. »
  2. Benedict-Henry Revoil, combat énergiquement l’opinion de Buffon. Histoire physiologique et anecdotique des chiens de toutes les races, p. 62.

    Richardson, Back, Parry et autres navigateurs arctiques ainsi que le célèbre voyageur et savant Pallas, attestent l’accouplement des chiens avec les louves Idem p. 68.

  3. Un superbe chien esquimeau, que je tenais, comme mesure de sûreté, parqué la nuit dans mon écurie, grugea de ses longues dents canines, un trou dans une cloison solide qui abritait un poulailler et bien que repus de la veille, il étrangla et avala, chair et os, un dindon dodu que nous réservions pour le dîner de Noël. Hélas !
  4. Le chien esquimau, dit M. l’abbé Ferland, a servi de base à toutes les familles de chiens au Labrador ; dans quelques localités, il s’est croisé avec des chiens appartenant à d’autres races ; ailleurs, il a été conservé pur et sans mélange. Le vrai chien esquimau est de forte taille ; sa robe est blanche avec quelques taches noires ; il a le poil long, les oreilles pointues, la queue touffue et relevée ; il n’aboie point, mais pousse des cris courts et étouffés, qui semblent être des essais d’aboiement. Il ressemble d’une manière frappante au loup du pays, ou plutôt c’est un loup réduit à l’état domestique ; assez souvent, on a vu un loup au milieu d’une troupe de chiens esquimaux, s’amusant à jouer avec eux ; mais les derniers semblent comprendre que cette compagnie n’est pas respectable ; car, dans ces occasions, dès qu’ils aperçoivent leur maître, ils prennent un air de gravité tout-à-fait comique. Les deux familles s’allient quelquefois ensemble.

    Si les chiens esquimaux ne savent point aboyer, en revanche ils sont habiles à hurler : chaque soir, autour des maisons, ils donnent un concert au profit des dormeurs. Un vieux chien commence ordinairement à donner le ton avec sa voix de baisse-taille ; puis, viennent les ténors et enfin les jeunes chiens se joignent con amore, aux anciens de la troupe, et un chœur de musique infernale continue ses lamentations jusqu’à une heure avancée de la nuit. »

  5. Pride of the Border, le magnifique setter de Charles H. Raymond de New-York, est évalué à $1,200. Franck Forester refusa $800, pour ses deux pointers.
  6. Canadian Antiquarian, Montréal, 1885, p. 19.
  7. Creuxius, Historia Canadensis p. 204.
  8. Relations des Jésuites, 1647.
  9. Récit de la mère de l’Incarnation, 1660.
  10. Histoire du Cap Santé, Gatien, p. p. 34, 35.
  11. De Gaspé, Mémoires, p. p. 41, 44.
  12. Pêle-mêle, Fréchette, p. 79, aussi Mes Loisirs p. 85.
  13. « Le pointer est le chien favori des anglais, et ils ont doublement droit d’en être fiers, puisque c’est leur création, et qu’elle est vraiment merveilleuse.

    C’est un chien à poil extrêmement ras, fin comme la soie et dont la robe affecte toutes les couleurs, mais principalement la couleur blanche tâchée de foie, d’orange ou de noir, la couleur la plus recherchée est la couleur blanche et foie, puis la couleur blanche et orange, et enfin la couleur blanche et noire ; mais avec le plus de blanc possible. Le poil doit être gros à la naissance, et très fin à l’extrémité. Il ne doit pas tomber plus bas que le jarret. L’oreille dont la finesse décèle la pureté du sang, doit être courte, et, quand on la ramène vers le nez, ne pas dépasser le coin de l’œil. Bien dressé, c’est un chien d’une obéissance absolue. La puissance de son nez, même par la chaleur est étonnante, et la rapidité de sa course est sans égale. Il n’est pas de chien plus brillant, ni ayant au même degré l’instantanéité et la fermeté de l’arrêt. Il tombe véritablement en catalepsie.

    Cette résistance à la chaleur, et cette faculté de conserver la finesse de son odorat dans les conditions les plus défavorables, font, que de l’autre côté de la Manche (en Angleterre), on s’en sert principalement à l’ouverture de la chasse, en plaine.

    Il est certain néanmoins, que la nature a mieux armé les petits cockers et springers, contre la morsure des ajoncs, et que la santé de ces chiens souffre moins que celle des pointers, de chasses journalières dans l’eau glacée des marais. » (Barreyre.)

    Le pointer trempé d’une longue pluie froide grelotte… il a sujet de regretter dans les épines et les ajoncs, le feutrage et les longues soies du setter.

  14. « Avant la révolution française, les races de chiens d’arrêt de la France étaient fort estimées, et il est incontestable que les Anglais leur ont fait plus d’un emprunt pour améliorer les leurs. Elles se distinguaient par la finesse du nez, jointe à la fermeté de l’arrêt ; mais elles manquaient d’allures et de fonds. Ces défauts n’avaient pas d’ailleurs, les inconvénients qu’ils présentent aujourd’hui, parce que le gibier abondait partout. Infiniment moins pourchassé, il était beaucoup plus abordable.
    (Barreyre.)
  15. Dictionnaire des Chasses.