Chants populaires de la Basse-Bretagne/Le Clerc de Plourin


LE CLERC DE PLOURIN
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I

  Un jeune clerc de Plourin
A désiré se faire capucin ;
Il a désiré se faire capucin,
Dans le grand couvent, le couvent de Perhet.

  Cruel eût été de cœur celui qui n’eût pleuré,
S’il eût été dans la ville de Huelgoat,
À voir la terre mouillée
(Par les larmes) du clerc qui faisait ses adieux.

  — Adieu, ma mère, adieu, mon père,
Adieu à la ville de Huelgoat ;
Adieu à la ville de Huelgoat,
Et bonne chance à mes sœurs.

  À mes frères je ne fais pas mes adieux,
Ils viendront me voir au couvent ;
Ils viendront me voir au couvent,
Au grand couvent, le couvent de Perhet.

  — Mon fils, si vous aviez été prêtre,
Vous auriez fait notre bonheur,
En vous voyant, le dimanche, faire le tour du cimetière,
À la procession de la grand’messe.

  — Etre prêtre est une grande charge,
C’est un métier dangereux ;
C’est un métier dangereux,
Mieux vaut être religieux.

II

  Son père et sa mère disaient
En arrivant dans la ville de Nantes :
— Où est le grand couvent par ici ?
J’y ai un fils clerc ;


  J’y ai un fils clerc,
Qui étudie pour être prêtre.
— Il fait le tour du cimetière,[1]
Je crois l’entendre chanter ;

  Je crois qu’il fait le tour du cimetière,
À la procession de la grand’messe.
— Bonjour à vous, mon fils le clerc.
— Et à vous, mon père, puisque vous êtes venu me voir ;

  Et à vous, mon père, puisque vous êtes venu me voir,
Ma mère est-elle en bonne santé ?
— Dieu lui donne assez bonne santé :
Votre mère est ici, comme moi.

  Madame Marie de Pitié,
Combien grand est l’amour ;
Combien grand est l’amour
D’une mère pour ses enfants !

  Venir à cinquante lieues me voir,
Et moi qui ne l’ai pas mérité !
— Mon fils, puisque nous sommes venus vous voir.
Que désirez-vous de votre bien ?

  — Je ne désire rien de mon bien,
(Je ne désire) que votre bénédiction pour rester ici.
— Vous aurez notre bénédiction à tous deux,
Et un peu de nos biens.

  — Je ne demande rien de vos biens,
Si ce n’est une douzaine de mouchoirs,
Pour essuyer la sueur et les larmes,
Quand je serai à prêcher dans les paroisses.

  Quand vous ferez votre partage,
Donnez mon héritage aux pauvres ;
Donnez mon héritage aux pauvres de mon pays,
Afin qu’ils se souviennent de moi ;

  Afin qu’ils se souviennent de moi,
Et qu’ils prient pour moi.
Sur la montagne du Calvaire est une croix,
La plus belle que jamais je vis ;



  Allons tous aider à la porter,
Avec Marie Madeleine :
Nous verrons notre Seigneur béni
Attaché sur la croix !


Chanté par Anna Salic,
Plouaret — 1864.







  1. À la procession de la grand’messe, on faisait le tour du cimetière, qui environnait les églises de nos campagnes.