Cham - Albums du Charivari/Allons-y gaiement

Journal le Charivari (5p. 135--).

ALLONS-Y GAIEMENT
ALBUM
DE 60 CARICATURES
PAR
CHAM
— Madame, c’est un monsieur. Il a été décoré, paraît-il, au 15 août.
— Un inconnu, sans doute. Dites que je n’y suis pas.

PARIS
ARNAULD DE VRESSE, ÉDITEUR
55, RUE DE RIVOLI, 55
LA VITRINE À L’EXPOSITION.

— Attends voir, Dumanet, je te vas dire tout de suite, si ces payses sont z’en bois.

— Viens donc, t’auras bien le temps de voir ça après l’Exposition.

ÉCOLE PRIMAIRE DE VILLAGE.

— Les parents ayant la fâcheuse habitude de ne pas y envoyer leurs enfants, l’architecte a jugé inutile de mettre une porte d’entrée.

PLATS GENRE PALISSY DE PULL.

Pour dégoûter du manger les personnes ayant une tendance à l’embonpoint.

PORTE D’ANVERS.

— Plus souvent que j’irais demeurer avec mes filles dans une maison où les portiers ne seraient pas vêtus plus que ça !

— Nous voudrions bien voir fonctionner votre machine.

— Passez votre chemin, imbécile ! c’était bon avant la distribution des récompenses.

Le monsieur myope qui a été fourrer son nez dans la machine à fabriquer la dentelle.

— Regarde ; voilà l’isthme de Suez venu à Paris pour voir l’Exposition. Quel succès pour la France !

— On ne s’assoit pas dans mon arithmomètre !

— Mais, monsieur, le calcul que je veux vous soumettre est dans ma vessie.

Se sentant blessés, tous les médaillés de bronze vont se réfugier dans les voitures d’ambulance du colonel de Breda.

Perruque imitant la nature, avec loupes pour compléter l’illusion.

— Cocher, vous allez me conduire à l’Exposition.

— T’es marié ? Tu n’as rien à faire dire à ta veuve ?

S’apercevant que la paix universelle n’est qu’un poisson d’avril, le congrès choisit un lieu de réunion approprié à la circonstance.

— Mon pauvre vicomte, c’est bien triste de n’avoir plus de but dans la vie !

— Vous venez m’emprunter de l’argent ? Désolé, cher monsieur, ma caisse a fermé le même jour que la prison de Clichy.

— À Clichy, j’avais un factionnaire à ma porte, comme un colonel, tandis qu’aujourd’hui, rien ! Quelle chute !

UNE CURE.

— Trente mille tonnerres ! levez-vous de suite, sinon je f… le feu à votre cambuse !

— En temps de paix, je fais quitter les béquilles, en temps de guerre je les fais prendre.

— Vous ne faites rien prendre à l’intérieur ?

— Les drogues, ça m’est défendu ; mais, comme zouave, je puis vous introduire mon sabre dans le ventre.

Les médecins obligés de s’habiller en zouaves pour inspirer désormais de la confiance à leurs malades.

— Pardon, gendarme, je vous ai envoyé chercher parce que j’ai plus de confiance en vous que dans les zouaves pour arrêter ma maladie.

— Ah ! mon Dieu ! dans quel état tu reviens !

— J’ai pas pu marcher sans mes béquilles, il a cru que j’y mettais de la mauvaise volonté, et il m’a administré une bonne raclée.

— Comme si qu’il n’y avait que les zouaves ! Vous allez obéir aussi à la ligne et quitter vos béquilles tout de suite, sinon que nous considérons la chose comme un affront.

— Si le trombone guérit les rhumatismes, que pourrais-je bien guérir, moi, une grosse caisse ? Parbleu ! les maladies de peau.

— Comme tu es poli avec les zouaves !

— Dame ! on ne sait pas, on peut avoir des rhumatismes !

— Je vous avais défendu de recevoir des militaires dans votre cuisine pendant mon absence.

— Oh ! madame, pendant l’absence de madame je l’ai reçu dans le salon.

— Mais où avez-vous fait vos premières cures ?

— Mais j’ai d’abord commence en Crimée, où j’ai fait marcher les Russes, puis en Italie où j’ai fait marcher les Autrichiens. Alors je me suis dit : Je peux faire marcher tout le monde.

— Chère amie, je reviens des eaux, guéri de mes rhumatismes.

— Quel ennui, je ne saurai plus maintenant quand le temps va changer !

— M’man, le proviseur m’avait confisqué ma pipe.

— Il te l’a rendue ? Quelle horreur !

— Oui, m’man, parce que je lui ai dit qu’elle était à toi.

PRÉOCCUPATION GÉNÉRALE.

— Msieu ! m’sieu !

— Qu’est-ce que c’est, polisson ?

— M’sieu, croyez-vous à la guerre ?

— Quel bonheur, tout l’argent de papa qui était placé en actions, il n’a plus le sou pour me remettre au collège.

PEU RASSURANT POUR LES PARENTS QUI VIENNENT À PARIS METTRE LEURS ENFANTS AU COLLÈGE.

— Oh ! la, la, maman, si on allait me couper la tête aussi !

La rentrée des classes évitant à la ville l’emploi du rouleau sur les voies avoisinant les lycées.
EN VACANCES.

— Mon ami, si nous faisions un peu de latin ensemble ?

— Oui, m’sieu, attendez une minute que je vous fasse une petite place sur cette branche, elle n’est pas très-solide, mais ça ne fait rien.

— Charles, qu’as-tu donc à pleurer ?

— Hi ! hi ! c’est humiliant ; un passant, me voyant habillé en collégien comme le petit mendiant, vient de me glisser un sou dans la main.

— Mais c’est une horreur ! ce n’est pas mon fils que vous avez vu jouant de la harpe dans les rues. C’est son costume de collégien qui vous trompe.

— Ne faites pas attention, mes enfants sont en vacances, toutes mes chaises sont déjà cassées.

— Tu te couvres la figure pour aller chercher un fiacre ?

— Pour m’assurer la politesse du cocher ; il me prendra pour l’homme masqué qui tombe les athlètes.

L’homme masqué s’avance un peu trop en acceptant une prise de tabac.

L’HOMME MASQUÉ.

— Ah ! saperlotte ! ma femme a l’air de le reconnaitre ! Et pourtant on ne lui voit pas la figure. Connaitre un monsieur tant que ça : c’est pas amusant pour moi !

AFFREUX À VOIR.

Aïssaouas passant sa langue sur des charbons ardents et autres choses brûlantes.

REPRÉSENTATION DES AÏSSAOUAS.

— Mosir, faire l’honneur de mangier charbon ardent avec moi ?

— Ne refuse pas, mon ami, il trouverait peut-être cela malhonnête.

— Qu’est-ce que tu fais donc là, Charles ?

— M’man, je me chauffe les mains, il vient d’avaler des charbons ardents.

— Satané Aïssaouas, je le mène au café et il m’avale une glace de Saint-Gohain de la valeur de 3 000 francs.

L’avaleur de sabre profite des querelles entre journalistes pour se garnir le ventre.

RETOUR AU PANTALON.

— Quelle chance ! j’avais des gigots, on vient de me rendre des jambes.

— Plus qu’un rang de boutons entre lui z’et moi ! mais où allons-nous, grand Dieu ! où allons-nous ?

— Brosseur, il n’y a plus un bouton à mes chemises.

— Dame ! capitaine, c’est le moment des grandes manœuvres pour les boutons. Le gouvernement les met sur deux rangs, et les blanchisseuses les envoient en tirailleurs.

Les inspecteurs de l’Université, trompés par l’uniforme, les interpellent en latin pour leur reprocher leur conduite.

— Tu joues ce morceau d’un ton trop haut.

— Jamais trop haut ! Je l’ai joué l’autre soir sur l’impériale d’un omnibus.

— Dis donc, ton petit crevé n’a pas l’air de s’amuser à Peau d’Âne.

— Je crois bien, on joue sa peau.

Que se serait-il donc passé, mon Dieu ! s’ils avaient tenu un congrès de la guerre ?

Désolé d’arriver trop tard pour donner, lui aussi, sa note comme pacificateur.

— Votre client ! C’est la première fois que je le vois à Paris à cette époque de l’année.

— Hélas ! je n’ai pas pu lui faire faire sa saison à Clichy.

— Ah ! mon Dieu ! un homme qui s’introduit dans ma chambre !

— Pardon, madame, je suis chroniqueur en voyage. Vous n’auriez rien à me raconter ?

— De retour ? Eh bien ! vous êtes-vous amusés à Bade ?

— Nous sommes restés couchés tout le temps pour tâcher de rêver un numéro.

— La somme que vos abonnés ont votée pour la statue de Campistron n’était pas suffisante, je n’ai pu exécuter que le piédestal.

— Cela suffit, c’est moi qui monterai dessus.

— Arrangez-vous de façon à ce que le grand homme auquel je fais élever une statue me ressemble.

— Je ne peux pas, cher ami, le pain de seigle a augmenté.

Venant s’assurer s’il n’aurait pas aussi changé son armement.