H. Fournier Éditeur (p. 284).

cela est vrai dans le département de l’Indre comme ailleurs. Ce proverbe m’a conduit au boulevard des Italiens.

— Où sans doute tu fus bien accueilli ?

— Parbleu ! j’avais cent cinquante mille francs ! Et cependant cette somme, renfermée en bons billets de banque dans mon portefeuille, me semblait alors une misère ! Je voulais cinquante mille livres de rente, ou rien. Je les ai eus pendant trois ans ; maintenant je n’ai rien.

— Tous tes vœux ont été remplis, reprit en souriant l’aîné des trois frères.

— Trop remplis même. J’étais à peine arrivé depuis vingt-quatre heures que déjà j’avais un ami.

— Un ami ?

— C’est le synonyme parisien d’un substantif désobligeant. Cet ami me prit si fort en affection qu’il m’intéressa dans une affaire de pavage en fer creux ; c’était le moment de la fièvre aux pavés. Tout homme qui se respectait avait son petit système de pavage dans la poche ; pavage en bitume, pavage en grès, pavage en chêne, pavage en sapin, pavage en cailloutis ; sous prétexte de paver Paris, on le dépavait. Je remerciai mon ami avec effusion, et mis vingt mille francs dans son entreprise. Ma fortune allait, grâce à notre pavage en fer creux, courir comme une locomotive sur un rail. Mon ami avait l’adjudication de la rue Rambuteau, alors au berceau. Notre spéculation était superbe ; malheureusement elle péchait par la base ; le pavé nous coûtait quatre francs, et la ville nous le payait soixante et quinze centimes ; mon ami me conseilla de me rattraper sur la quantité ; je suivis son conseil.

— Et tu perdis le double ?