Biographie nationale de Belgique/Tome 2/BOENE, Corneille

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BOENE (Corneille), ou BOONE, sculpteur, florissait à Gand, au XVe siècle. Il était né, selon certains indices, vers 1415, et mourut en 1492. Quelques biographes ont cru qu’il était aussi peintre, c’est-à-dire qu’il enluminait lui-même ses oeuvres sculptées; mais nul document n’est apporté à l’appui de cette assertion; aucune production picturale n’est connue de ce tailleur d’images, mentionné néanmoins comme ayant reçu l’instruction plastique dans l’atelier du peintre gantois Jean Martins. Admis maître sculpteur, à Gand, en 1445, il était déjà affranchi dans le métier des menuisiers, puisqu’en février 1444 (1443 v. s.) il construisait la table de la provisorerie des pauvres en l’église de Saint-Michel, à Gand. Cette table de distribution de pains et d’aumônes, avec stalles à dossiers élevés et ornementés, provoqua, peut-être, son entrée dans la section sculpturale de la corporation artistique. En 1447, il entreprit pour l’autel de Notre-Dame, dans l’église de Nazareth, village entre Gand et Audenarde, la confection d’un retable sculpté, où étaient représentées les cinq fêtes de la Vierge : la Nativité de Marie, l’Annonciation, la Conception, la Purification et l’Assomption. Ce retable était couronné d’un tabernacle à dais, destiné à la statue de la Vierge Mère. Il fit pour le même temple une chaire de vérité, dont les panneaux ornés offraient en haut-relief les bustes des quatre évangélistes. En 1450, le serment de la corporation des peintres et des sculpteurs, à Gand, le chargea d’importants travaux de parachèvement ou de restauration à exécuter au retable de leur chapelle de Saint-Luc, dans l’église des Jacobins (Dominicains). Ce retable figurait les Scènes épisodiques du Calvaire. Les travaux n’ayant pas été terminés à l’époque fixée par son engagement, il fut condamné par les doyens du métier et les échevins à les finir à prompt délai, sous nantissement de l’amende comminatoire de cinq cavaliers d’or. Les comptes communaux de Gand, de 1451-1452, rapportent, à la rubrique des frais de l’artillerie et des engins de guerre, que Me Corneille Boene dirigea la construction d’un grand engin, surnommé l’Ours et composé de couleuvrines et de crapaudines (coleueren ende crapaudeelen). Les Gantois s’en servirent pour fortifier l’une des portes de leur ville, durant la lutte insurrectionnelle soutenue contre Philippe le Bon. Dans les livres aux actes scabinaux est mentionné, en 1456, la livraison par Corneille Boene d’un de ces anciens lits en bois de chêne, si bien menuisés et taillés.

De temps immémorial la commune gantoise offrait annuellement, lors de la procession de l’élévation de la sainte croix, un riche baldaquin, à Notre-Dame la Flamande, vénérée dans la cathédrale de Tournai. Les échevins du chef-collége, voulant en assurer la confection artistique, confièrent, en 1454, et jusqu’à révocation par leurs successeurs dans la magistrature urbaine, l’ornementation sculpturale à Me Corneille Boene et les peintures décoratives à Me Nicolas Vander Meersch, maintefois doyen de sa corporation. Les deux artistes y avaient travaillé depuis plusieurs années et ne cessèrent qu’en 1470. — Il conste aussi d’un acte scabinal du 13 juin 1455, que Corneille Boene construisit des stalles pour le chœur de l’église de Saint-Nicolas, à Gand; par cet acte il s’engageait à acquitter, après le placement et le payement de ces stalles, le prix d’un harnais de guerre que lui avait cédé messire Griffon Van Damme, prêtre.

Me Corneille Boene semble avoir joui d’une certaine aisance, à en juger par les actes civils qui le concernent. Il était lettré, puisqu’en 1453 on le trouve sous-doyen de la compagnie de rhétoriciens gantois établie par octroi de Philippe le Bon, le 7 décembre 1448, sous l’invocation de la Sainte-Trinité et l’emblème de la Fontaine, ce qui valut aux confrères rhétoriciens le surnom de Fontainistes, désignation perpétuée jusqu’à nos jours. Son collaborateur, le peintre Nicolas Vander Meersch, était, en 1453, chef-doyen des Fontainistes.

Le sculpteur Corneille Boene était probablement le fils de Hugues Boene, maître peintre en 1429, juré en 1447, doyen en 1472. Il eut deux fils peintres : Étienne, franc-maître du métier en 1458, sous-doyen en 1477; Liévin, qui prit la maîtrise en 1462. Ce furent des décorateurs. Il y eut un autre Corneille Boene, sculpteur, affranchi en 1452, doyen en 1470. Celui-ci était fils d’Étienne, reçu en 1424 et juré en 1437. Nous n’avons pas d’autres renseignements sur eux.

Edm. De Busscher.

Regist. échevinaux et comptes communaux de Gandd du XVe siècle, Mss. — Chev. Diericx, Mémoires sur la ville de Gand. — De Busscher, Recherches sur les peintres et les sculpteurs à Gand aux xive et xve siècles, 1859. — Messager des sciences historiques, etc., année 1858.