Le chevalier de La Pause


Malgré le peu de confiance qu’on accorde généralement au sieur de C. il faut bien le citer puisqu’il est à peu près le seul à nommer les petits comparses de Bigot, les autres mémorialistes se contentant de nous faire connaître les grands coupables.

Le sieur de C. dit donc du chevalier de La Pause :

« On travailla, dit-il, dans les mois de mai et de juin de cette année 1755 à un chemin de Chambly au portage Beaucour. Le régiment de Guyenne y fut employé. M. de La Pause, aide-major, en eut le détail et dirigea cet ouvrage. C’est dans ces travaux qu’il a commencé à se faire connaître des généraux. Ce chemin fut pratiqué sur le terrain le plus beau et le plus uni de ce canton. Cependant la dépense n’en fut pas moins grande. Car environ deux cent vingt toises de chemin sur un si beau lieu ont coûté au roi une somme de soixante-trois mille livres sans y compter la perte des outils. Il est bien étrange qu’à des frais aussi extrêmes ce chemin n’ait pas été fini. Aussi cet officier fut-il en état de se faire un équipage. Il parut avec pompe parmi nos grands ; il en fut goûté, et c’est ce qui lui a procuré son avancement. Il était d’usage pour les dépenses qui se faisaient ci-devant dans les postes lorsqu’il n’y avait pas d’ingénieur, que le paiement en fût expédié par le garde-magasin avec le visa du commissaire et du commandant. Cette coutume fut abandonnée. M. de La Pause arrangeait tout lui-même. Il faisait le rôle des travailleurs, faisait de même les certificats, et en recevait le paiement. Grâce à cet arrangement, la fraude ne pouvait être connu que de lui ».[1]

M. de La Pause, disons-le à l’honneur des régiments de Montcalm, fut le seul officier régulier qui se compromit dans les dernières années du régime français. Disons de M. de La Pause que son seul accusateur est le sieur de C. Ceux qui ne croient pas aux dénonciations du sieur de C. ont donc le droit de croire en l’innocence de cet officier.

M. de La Pause avait nom Jean-Guillaume-Charles de Plantavit de Margov comte de La Pause.

Il était officier au régiment de Guyenne et il était passé ici en 1755. M. de La Pause était un ami intime du chevalier de Lévis et c’est lui qui lui obtint la croix de Saint-Louis à son retour en France. Il décéda maréchal de Camp le 9 mars 1804.

Le sieur de C. est le seul contemporain du chevalier de La Pause qui ait tenté de salir sa réputation. Tous les autres font l’éloge de ses talents, de sa délicatesse, de son honnêteté.[2]

  1. Rapport de l’Archiviste de la province, 1924-25, p. 135.
  2. La plupart des Mémoires du chevalier de La Pause sur la Nouvelle-France ont été publiés dans les Rapports de l’Archiviste de la province de Québec, années 1931-1932, 1932-1933, 1933-1934. Ces Mémoires, au nombre d’une quarantaine, démontrent que Montcalm et Lévis ne se trompaient pas en mettant toute leur confiance en cet officier.