André Arnoux


En 1749, André Arnoux était chirurgien-major des vaisseaux du Roi à Rochefort. D’après Mgr Tanguay, André Arnoux était originaire de la ville même de Rochefort, paroisse Saint-Louis. De son côté, M. P.-B. Casgrain prétend que Arnoux était né à Saint-Paul, diocèse de Vence.

André Arnoux s’embarquait sur la frégate du Roi la Diane, en juin 1749, pour le Canada où il venait d’être nommé chirurgien-major des troupes de la marine. Deux de ses frères, Blaise Arnoux, aussi chirurgien, Joseph Arnoux, apothicaire, passèrent au Canada en même temps que lui ou peu après.

Le chirugien Arnoux, par sa jovialité, son empressement à rendre service et probablement aussi par ses capacités de chirurgien, se créa bon nombre d’amis à Québec. En 1756, Montcalm entra en rapport avec Arnoux et dès lors ils furent de bons amis. Comme Arnoux était chirurgien en chef de l’armée et directeur général de tous les hôpitaux militaires du pays, il suivait Montcalm à peu près partout. Celui-ci fait très souvent allusion à Arnoux dans son Journal et ses lettres. Citons cette entrée de son Journal du mois de septembre 1757 : « J’avais résolu de ne jamais tenir d’enfant au baptême, après l’honneur d’en avoir tenu un avec madame la marquise de Vaudreuil, cependant Arnoux m’y force avec madame Lanaudière ». Et, le 20 septembre 1757, Montcalm écrivait à Bourlamaque : « Dites à Arnoux que je suis furieux de tenir son enfant sur les fonts et qu’il doit m’en savoir gré car cela me fait une grande affaire ».[1]

Montcalm, estimait Arnoux et voulait lui aider. Il écrivait au Ministre, de Montréal, le 20 juillet 1758 :

« Le sieur Arnoux, chirurgien major des troupes, que j’avais amené et que je ramène, est très actif et m’a été fort utile pour ce qui regarde les hôpitaux ».[2]

Arnoux était ami avec Montcalm. Mais il en avait d’autres moins recommandables, nommons Péan et Cadet pour n’en nommer que deux. Péan avait, rue Saint-Louis, une des plus belles résidences de Québec. Arnoux l’acheta, en mars 1758, pour la somme de 30,000 livres qu’il paya comptant.

C’est dans cette maison de la rue Saint-Louis que la tradition fait mourir Montcalm. Malheureusement, Arnoux était absent de Québec et il ne put donner les secours de son art à son ami. C’est un de ses frères qui le remplaça auprès du lit de Montcalm.

Les chirurgiens ont bien raison de dire que la gangrène gagne tout l’individu si elle n’est arrêtée à temps. Il en est de même dans les gouvernements, les sociétés, quand la gangrène gagne un membre elle se répand en peu de temps à tout l’organisme. C’est ce qu’on vit dans les dernières années du régime français au Canada.

Qui aurait pensé que le Jovial chirurgien André Arnoux, que Montcalm affectionnait particulièrement et qui était l’ami de tous, fut, lui aussi, un profiteur.

S’il ne fut pas incriminé devant le Châtelet de Paris, c’est qu’il y avait une raison de force majeure en sa faveur, il était mort depuis 1760.

Dans le cas d’André Arnoux, hâtons-nous de le dire, il y a des circonstances atténuantes. Jusqu’au jour où on lui confia l’achat des médicaments nécessaires à l’armée, le chirurgien avait été peu mêlé aux affaires. Il se peut que sa tenue de livres était fautive et qu’après sa mort ceux qui furent chargés de débrouiller ses comptes les aient mal compris.

Une chose est certaine toutefois c’est que les achats qu’il avait faits pour le Roi ne l’avaient pas enrichi car il laissa sa veuve dans une position fort précaire. Retournée en France, on la voit aux prises avec les officiers du Roi pour régler les comptes de son mari défunt.

Le 29 janvier 1766, le président du Conseil de marine envoyant à M. de Fontanien un mémoire de la veuve Arnoux qui demandait un acompte de 10,000 livres sur les fournitures faites par son mari aux hôpitaux établis à la suite des armées de Montcalm et de Lévis en 1759 et 1760. Madame Arnoux, dénuée de tout et malade, était alors dans un hôtel garni de Paris.

Madame Arnoux, dans l’intervalle, avait trouvé des protecteurs qui intercédèrent pour elle auprès du président du Conseil de Marine. Le 27 mai 1767, celui-ci écrivait de nouveau à M. de Fontanien au sujet de la veuve qui alléguait que faute de pièces justificatives on avait réduit sa réclamation à 30,970 livres. Elle se faisait fort de prouver ses comptes si on pouvait lui fournir un état des malades à l’hôpital de Québec du 28 avril 1760 au 29 juillet de la même année.

Madame Arnoux rencontra dans la comtesse d’Humebek, une amie dévouée et compatissante. Elle fit tout ce qu’elle put pour soulager sa détresse. Le 14 mars 1775, le président du Conseil de Marine écrivait à la comtesse d’Humebek qu’il ne pouvait revenir sur les demandes de madame Arnoux pour être payées de médicaments fournis par son mari. Ces demandes avaient été refusées dans le temps. De « fortes pensions », ajoutait-il, ont cependant été accordées à madame Arnoux et à ses filles.

  1. Journal de Montcalm.
  2. Lettres de Montcalm.