Pierre-Jacques Payen de Noyan


Né à Montréal le 3 novembre 1695, il était le fils de Pierre Payen de Noyan, officier dans les troupes de la marine, et de Catherine-Jeanne Lemoyne de Longueuil, sœur des célèbres frères Lemoyne de Longueuil, ce qui veut dire que le sang des braves coulait dans ses veines.

M. Payen de Noyan fut successivement commandant au fort Frontenac, puis du poste de la Pointe à la Chevelure. Saint-Frédéric et ensuite du poste de Détroit. De là, il revint au fort Saint-Frédéric. Il devint, en 1749, major de Montréal, en 1756, lieutenant de Roi aux Trois-Rivières, poste qu’il garda jusqu’en 1757.

En 1757, M. de Noyan laissait temporairement la lieutenance de Roi des Trois-Rivières pour aller prendre le commandement du fort Frontenac. C’était là un fait sans précédent dans l’histoire militaire de la colonie. Un lieutenant de Roi, commandant d’un fort. Mais l’auteur du Mémoire sur les affaires du Canada de 1749 jusqu’à 1760 explique cette déchéance apparente.

« On lui avait donné ce commandement, qui était au-dessous de son grade, dit-il, pour améliorer ses affaires qui étaient extrêmement dérangées. Cet officier était savant, poète, et se mêlait de la médecine ; sa verve avait été un peu piquante, ce qui lui avait attiré quelques ennemis ; et M. de Vaudreuil qui n’était pas savant, le haïssait, quoiqu’il lui eut quelques obligations ; il avait 68 ans et était infirme, mais dans cet âge avancé il conservait toute la liberté de son esprit et était en état de faire honneur à un poste qu’on lui donnerait à défendre avec des forces suffisantes ».

En réalité, M. de Noyan n’avait que soixante-trois ans, mais même à cet âge il fallait agir vite pour rétablir ses affaires car la retraite devait sonner bientôt pour lui. Aussi, M. de Noyan se mit à l’œuvre dès son arrivée au fort Frontenac. Dans son témoignage devant le Châtelet de Paris, le munitionnaire Cadet déclara qu’il avait souvent donné des sommes d’argent au sieur de Noyan. Et, comme Cadet, ne donnait jamais rien pour rien, nous avons le droit de supposer que M. de Noyan grossissait ses états de ration et rendait bien d’autres services à ce peu scrupuleux personnage.

Le Mémoire sur les affaires du Canada dit encore au sujet de M. de Noyan ;

« Ce général (le gouverneur de Vaudreuil) ne voulut pas convenir que c’était sa faute (la perte du fort Frontenac), et aima mieux la rejeter sur M. de Noyan : afin que celui-ci ne le prévint point, il lui fit insinuer qu’il lui seroit plus avantageux de laisser le compte à rendre au Général, qui ne manqueroit pas d’écrire en sa faveur et de lui procurer des grâces dont il avoit besoin. M. de Noyan se laissa aisément prévenir ; il n’avoit aucun sujet de se défier du Général ; il avoit fait son devoir ; et s’il y avoit de la réprimande à avoir, M. de Vaudreuil se trouvoit plus coupable que lui ; dans cette idée il le laissa faire ; cependant le Général se claira, et rejeta tout sur M. de Noyan en faisant cependant comprendre que son grand âge avoit affoibli son esprit ; il demanda sa retraite qu’on lui accorda : ainsi cet Officier se trouva la dupe de sa bonne foi. Lorsqu’il sut sa retraite il écrivit à la Cour, mais ce fut inutilement. »

Il est bon de noter encore une fois que l’auteur du Mémoire sur les affaires du Canada dépasse presque toujours le but. Sa haine contre M. de Vaudreuil suinte à chacune des pages de son récit. Il faut donc accepter ses dires avec beaucoup de précautions.

En tout cas, après la perte de la colonie, M. de Noyan passa en France comme la plupart des officiers des troupes de la marine.

Arrêté en 1761, il fut emprisonné à la Bastille et subit son procès devant le Châtelet.

Les juges, de toute évidence, tinrent compte de l’âge de M. de Noyan, de ses beaux états de services et, aussi, probablement, de sa pauvreté. Il fut admonesté par les juges, le 10 décembre 1763, et condamné à payer six livres d’aumône. Les portes de la Bastille lui furent ouvertes le même jour.

Nous ignorons où et quand il mourut. Il est certain, toutefois, qu’il ne revint pas au Canada.