Barzaz Breiz/1846/Les Nains/Bilingue

Barzaz Breiz, édition de 1846
Les Nains



V


LES NAINS.


( Dialecte de Cornouaille. )


Paskou le Long, le tailleur, s’est mis à faire le voleur, dans la soirée de vendredi.

Il ne pouvait plus faire de culottes; tous les hommes sont partis pour la guerre contre les Français et leur roi.

Il est entré dans la grotte des Nains avec sa pelle, et il s’est mis à creuser pour trouver le trésor caché.

Le bon trésor, il l’a trouvé, et il est revenu chez lui en courant bien vite ; et il s’est mis au lit.

— Fermez la porte, fermez-la bien ! Voici les petits Dus de la nuit.

— « Lundi, mardi, mercredi, et jeudi, et vendredi ! » —

— Fermez la porte, mes amis : voici, voici les Nains !

Les voilà qui entrent dans la cour ; les voilà tous qui y dansent à perdre haleine.

— « Lundi, mardi, mercredi, et jeudi, et vendredi. » —

— Les voilà qui grimpent sur ton toit ; les voilà qui y font une trouée.


Tu es pris, mon pauvre ami ; jette vite dehors le trésor.

Pauvre Paskou, tu es un homme mort ! Asperge-toi d’eau bénite ;

Jette ton drap sur ta tête ; Paskou, ne fais pas un mouvement.

— Aïe ! ils rient aux éclats ; qui s’échapperait serait fin.

Seigneur Dieu ! en voici un ; je vois sa tête qui s’avance par le trou ;

Ses yeux sont rouges comme des charbons. Il glisse le long du pilier.

Seigneur Dieu ! un,deux et trois ! les voilà en danse sur l’aire !

Ils bondissent et enragent. Sainte Vierge ! je suis étranglé !

— « Lundi, mardi, mercredi, et jeudi, et vendredi. » —

Deux, trois, quatre, cinq et six ! — « Lundi, mardi , mercredi !

« Tailleur, cher petit tailleur, comme tu ronfles là, hé !

« Tailleur, cher petit tailleur, montre un peu le bout de ton nez.

« Viens-t’en faire un tour de danse ; nous t’apprendrons la mesure ;

« Tailleur, cher petit tailleur ! Lundi, mardi, mercredi.


« Petit tailleur, tu es un fripon. Lundi, mardi, mercredi.

« Reviens nous voler encore ; reviens, méchant petit tailleur ;

« Nous t’apprendrons un bal qui fera craquer ton échine. — Monnaie des Nains ne vaut rien. —


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