Léon Vanier, libraire-éditeur (p. 7-8).
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I



Par la fenêtre grande ouverte à l’air marin,
Sous le soleil tombant déjà, — les dunes d’ambre,
Le ciel, — nacre volante — et le fluide écrin
De la lagune verte — envahissent la chambre :
Sur les murs chatoyants de blonds rayons tremblés
Se jaspent les reflets de courants ondulés ;
Toute une vie alerte aux fragrances salines
S’éveille en palpitant, frôlant les meubles lourds
Et les gaîtés du large incitent les plis gourds
Des tentures — au mol essor des mousselines.


Souple, ballante sur l’éclat glauque irisé
Que pâlissent les longues plumes de la brise, —

Presque noire en ces clairs Troubles — et trop précise,
Une branche berçant des fleurs de lait rosé, —
Malgré l’inachevé mousseux de leurs pétales,
Le lumineux halo qui nimbe sa vigueur,
Evoque un autre Monde aux grâces plus brutales, —
Peut-être hostile, car, en sa rude langueur,
L’éventail monstrueux semble agiter de l’ombre…


..... La floraison rivale, épanouie au flot,
Plus intense mais plus éphémère, se clôt,
Fanée en un moment — et se dissout — et sombre…


… Un grêle serpent d’or que l’on dirait mouillé,
Glacial, — rampe sur une dune houleuse…
— Et captif dans le cadre étroit et désolé
De la fenêtre, où va poindre un givre étoile,
Le soir frissonne, comme une rose frileuse.