Au jardin de l’infante/La Vie est comme un grand violon…

Au jardin de l’infanteMercure de FranceŒuvres de Albert Samain, t. 1 (p. 171-172).

La Vie est comme un grand violon qui sanglote,
Et le peuple obstiné, qui grouille aux carrefours,
Marche dans cette angoisse, et fourmille, et clapote,
Ivre de verser l’heure au tonneau vain des jours.


L’Art seul, rare et désert, magicien des moelles,
D’un séraphique archet de diamant et d’or,
Triste, laisse tomber des notes en étoiles,
Et suscite l’immense extase d’une mort.



Des cœurs flétris ! Des cœurs meurtris ! Larmes et luttes !
Quand tu peux, dans un ciel de lyres et de flûtes,
Épanouir ton âme exquise en rêves-fleurs…


Au-dessus de la terre acharnée et falote,
La Vie est comme un grand violon qui sanglote…
Ô mon cœur, laisse-moi m’envelopper d’ailleurs.