Au bagne/Note de l’Editeur

Au bagne (1924)
Albin Michel (p. 7-9).


NOTE DE L’ÉDITEUR




La nouvelle édition de Au Bagne, que nous présentons aujourd’hui, arrive juste au moment où ce livre vient d’atteindre le but qu’il s’était proposé.

Au Bagne à peine paru, les pouvoirs publics ne purent moins faire que de s’émouvoir des révélations de cette enquête. Le ministère des Colonies nomma tout de suite une commission chargée d’arrêter des mesures de réforme.

Cette commission n’avait pas terminé ses travaux que le gouvernement décidait de suspendre les envois de forçats à la Guyane.

Ce régime dura deux ans.

Par suite de manque de crédit, l’état ancien des choses fut rétabli. Les forçats reprirent le chemin de Saint-Laurent-du-Maroni.

La suppression du bagne, telle qu’on avait commencé de l’envisager, n’était d’ailleurs pas une solution. L’auteur de ce livre n’avait pas mené sa campagne contre le bagne, mais contre ses scandales.

Ce sont eux qui devaient disparaître.

De fait, plusieurs réformes, d’abord, furent acquises :

Les fers, la nuit, furent supprimés ;

Les cachots noirs, où les forçats devenaient aveugles, furent supprimés ;

Le camp Charvein, où les « punis » travaillaient nus dans des conditions inhumaines, fut supprimé ;

Le régime des peines encourues pour fautes commises au bagne fut abaissé ;

La nourriture fut « surveillée ».

L’essentiel restait à faire :

Continuerait-on de jeter les condamnés primaires à temps, pêle-mêle, parmi les pires déchets sociaux ?

Continuerait-on de condamner les forçats ayant terminé leur peine à mourir de faim sur le sol de la Guyane ? (Doublage.)

Le Parlement vient de répondre non.

Le 15 décembre 1931, la Chambre des députés adopta une proposition de loi de M. Maurice Sibille, rapportée par Maurice Drouot, proposition modifiant « les conditions d’exécution de la peine des travaux forcés ».

Cette nouvelle loi décide :

1o De donner à la cour d’Assises le pouvoir de dispenser de la transportation le condamné non relégable qui subira en France une peine de réclusion aggravée ;

2o D’abroger l’obligation à la résidence temporaire (doublage) ou perpétuelle.

On se souvient, à ce propos, que tout condamné à 5 ans et à 7 ans, devait, sa peine achevée, rester encore en Guyane, un nombre de temps égal, et que tout condamné à 8 ans et plus, devait y demeurer à perpétuité.

Telles furent les conséquences du livre Au Bagne.