Astronomie populaire (Arago)/XXVIII/03

GIDE et J. BAUDRY (Tome 4p. 391-394).

CHAPITRE III

influence de la vitesse de la lumière sur les valeurs observées de la révolution synodique des satellites de jupiter


La question que nous nous proposons de résoudre est la suivante : la durée de la révolution synodique déterminée par l’observation des immersions ou des émersions est-elle toujours la même, et, dans le cas de la négative, quelle est l’influence de la vitesse de la lumière sur ces durées ?

Il est évident qu’aux époques de l’année où les distances de Jupiter à la Terre restent à peu près constantes, les durées des révolutions synodiques déduites des observations des émersions ou des immersions des satellites doivent être indépendantes de la vitesse de la lumière, puisque cette vitesse affectera également deux observations consécutives. Or, il y a deux époques dans l’année où, pendant plusieurs jours successifs, la distance de Jupiter à la Terre reste à peu près la même : ces époques sont celles qui précèdent ou qui suivent les moments des conjonctions et des oppositions. On s’en convaincra en plaçant sur deux cercles concentriques dont le Soleil occupera le centre commun (fig. 334), deux astres qui soient en conjonction ou en opposition. Ainsi les lignes Ta, Ta′, Ta″, sont très-peu différentes entre elles ; il en est de même des lignes Tb, Tb′, Tb″ qui ne diffèrent que très-peu ; au contraire, toutes ces lignes sont ou beaucoup plus grandes ou beaucoup plus petites que la ligne Tc. On s’assurera encore mieux de la vérité du fait par l’observation micrométrique du diamètre de Jupiter, lequel restera constant pendant un certain nombre de jours avant ou après les deux époques susmentionnées.

Il est plus évident encore, par les mesures du diamètre angulaire de Jupiter et par celles de l’angle sous-tendu par l’élongation du satellite, que près de l’opposition et près de la conjonction, la distance de la planète et celle du satellite à la Terre ne varient presque pas, de manière qu’à cette époque les durées de la révolution du satellite, ou les intervalles compris entre deux immersions successives, doivent être indépendantes de la vitesse de la lumière, car cette vitesse affecterait également les deux observations comparées. On pourra donc, à l’aide d’une immersion et d’une émersion observées un certain nombre de jours avant ou après la conjonction ou l’opposition, déterminer celle qui a dû avoir lieu dans ces positions remarquables et que des causes physiques, déjà signalées, nous empêchent d’observer directement.

Fig. 334. — Variations des distances moyennes de la Terre à Jupiter aux diverses époques.

Il est bien entendu que si l’on compare les durées des révolutions synodiques déduites des observations faites près des oppositions ou des conjonctions, on les trouvera différentes de celles qu’on calculerait d’après les observations faites dans d’autres positions, dans les quadratures, par exemple.

Examinons présentement de combien a varié la distance de Jupiter à la Terre, de l’opposition à la conjonction. De T en J (fig. 331), distance de la Terre à Jupiter en opposition, il y a une valeur égale à la demi-différence entre les diamètres des orbites de Jupiter et de la Terre. La distance de T en J‴, ou la distance de la Terre à Jupiter en conjonction, se compose du diamètre TA de l’orbite terrestre, augmenté de la différence AJ‴ qui, comme TJ, est la demi-différence des diamètres des deux orbites ; donc la différence entre la distance de Jupiter à la Terre en conjonction à la distance de Jupiter à la Terre en opposition, est égale à TA, double de 38 millions de lieues ou de la distance moyenne du Soleil à la Terre.

Ajoutons encore une remarque qui nous sera très-utile : le temps que Jupiter paraît employer à aller de la conjonction à l’opposition est exactement égal au temps dont il a besoin pour aller de l’opposition à la conjonction ; puisque le temps réel de la révolution du satellite est toujours le même, il devra y avoir de la conjonction à l’opposition un nombre d’immersions exactement égal à celui des émersions qui s’effectueront entre le jour de l’opposition et celui de la conjonction. En outre, connaissant toutes les circonstances du mouvement d’un satellite autour de la planète, on peut déduire facilement de l’observation de l’époque d’une immersion visible, l’instant exact de l’émersion invisible suivante, ou réciproquement.