Astronomie populaire (Arago)/XVIII/02

GIDE et J. BAUDRY (Tome 2p. 491-493).

CHAPITRE II

connaissances des anciens sur mercure


Les noms des planètes nous viennent des Latins, mais ils sont au fond la traduction des mots grecs par lesquels on désignait primitivement ces astres.

« Il a fallu sans doute, dit Laplace, une longue suite d’observations pour reconnaître l’identité de deux astres que l’on voyait alternativement le matin et le soir, s’éloigner et se rapprocher alternativement du Soleil ; mais comme l’un ne se montrait jamais que l’autre n’eût disparu, on jugea enfin que c’était la même planète qui oscillait de chaque côté du Soleil. »

Cette remarque de Laplace explique pourquoi les Grecs donnèrent à cette planète les deux noms d’Apollon, le dieu du jour, et de Mercure, le dieu des voleurs, qui profitent du soir pour commettre leurs méfaits.

Les Égyptiens s’occupèrent de Mercure sous les deux noms de Set et d’Horus ; les Indiens l’appelaient Boudha et Rauhineya.

Les connaissances astronomiques étaient si peu avancées chez les Romains, que dans l’un des deux passages où il parle de Mercure, Cicéron le place entre Vénus et Mars, tandis qu’en réalité il est situé entre Vénus et le Soleil. Dans le second des passages auxquels je fais allusion, dans le Songe de Scipion, le grand orateur suppose que Mercure circule autour du Soleil. Cette notion, bien plus logique que la première, aurait été, suivant Macrobe, empruntée aux Égyptiens.

Mercure, comme on a vu, ne s’éloigne jamais beaucoup de l’astre radieux autour duquel il fait sa révolution ; il se couche peu de temps après lui ; l’intervalle qui s’écoule entre les levers est également limité. Il ne peut donc être observé à l’œil nu que dans la lumière crépusculaire et près de l’horizon.

Là où l’horizon se trouve habituellement dégagé de nuages, la planète est facilement aperçue ; aussi les anciens appelaient Mercure l’étincelant (στιλϐων).

Cette dénomination ne s’accorde guère avec cette remarque chagrine de Copernic « qu’il descendrait dans la tombe avant d’avoir jamais découvert la planète » ; elle fut toujours enveloppée pour lui dans les vapeurs de la Vistule. Disons, cependant, que dans l’île d’Hueen, sous un climat qui ne devait être pas plus favorable que celui de Frauenbourg, Tycho observa souvent Mercure à l’œil nu.

Les phases de Mercure sont si difficiles à apercevoir à cause du petit diamètre de cette planète et de la vivacité de sa lumière, que Galilée, avec les instruments imparfaits dont il faisait usage, ainsi qu’on le voit par le troisième" Dialogue, ne put pas en constater l’existence.

Hévélius lui-même, beaucoup plus tard, signalait ces phases comme très-difficiles à observer. Néanmoins, Mercure lui avait paru parfois nettement dichotome.

Existe-t-il quelques observations des phases antérieures à celles-là ? c’est ce que je ne pourrais affirmer.