Astronomie populaire (Arago)/XIV/05

GIDE et J. BAUDRY (Tome 2p. 91-94).

CHAPITRE V

théorie de la constitution physique du soleil.


Fig. 156. — Formation d’une tache noire sans pénombre.

Tous les phénomènes dont nous avons parlé s’expliquent d’une manière satisfaisante, si l’on admet que le Soleil est (fig. 156, 157 et 158) un corps obscur S entouré à une certaine distance d’une atmosphère ab, qui peut être comparée à l’atmosphère terrestre lorsque celle-ci est le siége d’une couche, continue de nuages opaques et réfléchissants. Si on place de plus, au-dessus de cette première couche, une seconde atmosphère lumineuse cd, qui prendra le nom de photosphère, cette photosphère, plus ou moins éloignée de l’atmosphère nuageuse intérieure, détermine par son contour les limites visibles de l’astre. Suivant cette hypothèse il y a des taches noires sur le Soleil toutes les fois qu’il se forme dans les deux atmosphères concentriques des ouvertures ou éclaircies correspondantes, qui permettent de voir à nu le noyau obscur de l’astre.

Considérons une tache dans une position centrale, et supposons que l’ouverture qui s’est formée dans la photosphère ait des dimensions inférieures à celles de l’atmosphère réfléchissante intermédiaire (fig. 156) ; alors on ne verra à travers les deux ouvertures que le corps obscur du Soleil ; la tache noire n’aura pas de pénombre.

Supposons, au contraire, que l’ouverture dans la photosphère soit plus large (fig. 157), que l’ouverture correspondante de la sphère nuageuse, dans ce cas l’œil découvrira non-seulement le noyau central du Soleil, mais encore autour de ce noyau une partie de l’atmosphère non lumineuse dont il est entouré ; cette atmosphère ne sera aperçue que par la réflexion de la lumière de la photosphère qui s’est dirigée de l’extérieur à l’intérieur.

La cause, quelle qu’elle puisse être, qui détermine l’écartement dans la matière dont se compose l’atmosphère réfléchissante, semble devoir occasionner une accumulation de cette matière tout près des bords de l’ouverture ; or, une accumulation de matière doit avoir pour conséquence une augmentation dans la réflexion des rayons lumineux. On voit que par là on rendrait assez bien compte de l’augmentation de clarté de la pénombre dans le voisinage du noyau obscur qu’elle entoure, (c’est-à-dire des facules)
Fig. 157. — Formation d’une tache avec noyau et pénombre.

La supposition qu’il n’existerait d’ouverture accidentelle que dans la photosphère (fig. 158) servirait à expliquer les taches sans noyaux, les taches seulement formées de pénombre.

On peut se demander si le Soleil se termine brusquement aux limites extérieures de sa photosphère. Cette question n’a pu être résolue qu’à l’aide de l’observation des éclipses totales de Soleil, car la lumière, réfléchie par notre atmosphère, empêche dans toute autre circonstance d’apercevoir des traces de cette troisième atmosphère. Nous devons donc renvoyer l’examen de cette question au livre où nous parlerons des éclipses solaires totales.
Fig. 158. — Formation d’une tache sans noyau.
Disons toutefois, dès ce moment, que l’existence de cette troisième atmosphère sera établie par des observations démonstratives, en sorte qu’en définitive on sera obligé d’admettre que le Soleil est formé d’un noyau obscur enveloppé d’une atmosphère réfléchissante et quelque peu opaque, à laquelle succède une atmosphère lumineuse ou photosphère, enfouie elle-même à une certaine distance d’une atmosphère diaphane.