Anthologie japonaise ; poésies anciennes et modernes/Hyakou-nin-is-syou/Le traversin

LE TRAVERSIN






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Haru-no yo-no yŭme bakari naru ta-makura-ni,
Ka-’i naku tatam na-koso osi kere[1].


Si j’acceptais, pour me servir de traversin, le bras que vous m’offrez et qui ne doit être pour moi qu’un rêve d’une nuit de printemps,

Il se répandrait de regrettables bruits sans compensation pour mon cœur[2]. Ces vers, tirés du Sen-zaï-siû, ont été composés par la fille de Taïra-no Tsŭ-gu-naka, seigneur de Sŭwo. Au deuxième mois (ki-saragi), il y eut une réunion dans un endroit appelé Ni-deô-no-in. Parmi les personnes invitées se trouvait une dame de haut rang du titre de Naï-si (dame de la cour). Comme cette dame exprimait le désir d’avoir un coussin pour appuyer sa tête, le daïnagon Iye-tada lui offrit son bras en la priant de s’en servir en guise de traversin. C’est alors que la dame lui répondit par ces vers.


たまくら ta-makura, pour てまくら te-makura, signifie « un traversin formé à l’aide du bras ». Par « le rêve d’une nuit de printemps », le poëte veut dire que Iyé-tada ne doit pas continuer à l’aimer, que son amour doit être passager. Par l’expression « sans compensation » (littér. « sans avantage »), la dame veut insinuer que, pour un attachement durable, elle ne refuserait pas de s’exposer aux propos malveillants, mais que l’amour du daïnagon ne saurait être durable.

  1. Hyakŭ-nin-is-syu, pièce lxvii ; Hito-yo gatari, vol. VI, fo 47 ; Si-ka-zen-yô, p. 26.
  2. Un poëte de la Grèce moderne a dit :

    Τὸ χέρι σου τὸ πάχουλο
    Τὸ ϰονδυλογραμμένο,
    Νὰ τὄϐαινα προσϰέϕαλι !

    (Distiques amoureux du Recueil de Lelékos.)