Anthologie féminine/Princesse Belgiojoso

Anthologie féminineBureau des causeries familières (p. 312-313).


LA PRINCESSE BELGIOJOSO
(née en 1808)


Née à Milan, elle vint résider à Paris, ne pouvant supporter d’habiter sa ville natale sous la domination autrichienne ; elle y présida un salon d’élite comme celui de Mme de Staël et de Mme Récamier. Le beau portrait, tracé par Stendhal dans la Chartreuse de Parme, de la duchesse de San Severino aurait été inspiré par elle.

« La princesse Belgiojoso, nous dit Mme Ancelot, qui la rencontrait dans le salon du peintre Gérard, était aussi remarquable par son esprit que par une beauté dont le caractère avait quelque chose de particulier qui frappait étrangement, et dont la vie est aussi remplie d’excentricités que sa figure présente de traits bizarres. Sa vive imagination, excitée par les scènes tumultueuses de notre époque, ne pouvait se restreindre aux paisibles émotions et aux succès féminins que l’on trouve dans les salons. »

Elle a écrit : Souvenirs d’exil, 1850, Notions d’histoire à l’usage des enfants, 1851, Nouvelles et scènes de la vie turque, Essai sur la formation du dogme catholique, articles dans le National et la Revue des Deux-Mondes.


ÉMINA
(récit turco-asiatique)

Légèrement vêtue d’un pantalon d’indienne suisse imprimée, retenu par une coulisse au-dessus de ses chevilles nues, d’une chemise en calicot blanc retombant sur le pantalon et remplissant l’office de jupe, d’une veste de calicot rayé rouge et jaune, descendant jusqu’au bas des reins et serrée à la taille par une écharpe de même étoffe ; les bras couverts d’abord par les larges manches de sa chemise, et ensuite par celles plus étroites et plus courtes de sa veste ; les cheveux tressés et tombant sur ses épaules, la tête couverte d’un fez, sur lequel un mouchoir en mousseline fond vert, bigarré de couleurs éclatantes, flottait carrément par derrière à la façon d’un voile ; un grand bâton à la main, et ses provisions serrées dans une serviette passée en sautoir ; telle était Émina, lorsqu’elle s’éloignait de la vallée, suivant ses chèvres et suivie par son chien.