Anthologie (Pierre de Coubertin)/II/XXXI

Anthologie (Pierre de Coubertin)/II
AnthologieÉditions Paul Roubaud (p. 82).


Mathias Corvin.

Jean Hunyade, régent du royaume (1438-1457) repoussa si vaillamment l’envahisseur ottoman que de son fils Mathias, la gratitude populaire fit un roi à quinze ans. Le choix était bon. L’homme se montra fougueux, impérieux, orgueilleux, mais aussi éloquent, fin et cultivé : le type premier de ces magnats hongrois en lesquels s’unirent, comme on l’a dit, le faste de l’émir oriental, l’acuité du légiste byzantin et l’esprit pratique du lord anglais. Quant au souverain, il réalisa pleinement les espérances de ceux qui l’avaient élevé. Son long règne (1458-1490) fournit comme le moule de la civilisation magyare. Enthousiaste et belliqueuse, rude et lettrée, violente et indomptable, elle eut, dès lors, sa formule finale. L’éclat donné par Mathias à sa cour et la force de son gouvernement ne lui survécurent point. Il était sans héritier. Après lui, le roi de Bohême fut élu. C’était un Jagellon. Entre ces trois royaumes de Hongrie, de Bohême et de Pologne que menaçaient les mêmes dangers à savoir le germanisme au dedans, la poussée orientale au dehors et dont les institutions oscillaient dangereusement entre le principe héréditaire et le principe électif, il se nouait ainsi de passagères unions qui ne pouvaient conduire à aucune collaboration féconde tant les trois peuples étaient mal faits pour se comprendre et s’associer. Aussi bien le rempart opposé par Hunyade et son fils allait-il céder. En 1526, le roi Louis II périrait à la bataille de Mohacz à la tête de ses troupes ; Bude serait prise par les Turcs dont, deux siècles durant, le despotisme meurtrirait la Hongrie.