Annales de pomologie belge et étrangère/du Figuier

du Figuier

Ficus — (Lin.)

Genre de plantes de la famille des Urticées, Juss., et de la polygamie diœcie, Linné.


Fleurs unisexuelles, réunies en grand nombre dans un réceptacle commun, charnu, concave, connivent à son sommet, où il est presque formé par plusieurs rangs de petites dents.

Fleurs pédicellées : les mâles ont un calice tri ou quinquélobé, les lobes lancéolés et trois à cinq étamines ; les femelles ont un calice à cinq divisions, un ovaire supère, surmonté d’un style en alêne, à deux stigmates aigus. Chaque ovaire fécondé devient une graine pulpeuse, comprimée et leur réunion dans le réceptacle constitue le fruit qu’on nomme figue.

Les Figuiers sont des arbres ou des arbrisseaux dont le suc propre est laiteux et dont les rameaux et les feuilles sont alternes. Celles-ci sont enfermées, avant leur développement, entre les stipules formant, autour d’elles, une sorte de graine terminale promptement caduque ; elles ont la grandeur de la main environ, sont cordiformes à leur base, découpées en trois ou cinq lobes ; d’un vert foncé en dessus, plus pâle en dessous, scabres, à nervures saillantes et couvertes de poils nombreux. Les fruits sont le plus souvent axillaires ou solitaires et parfois rassemblés plusieurs ensemble.

Ce genre se compose d’un grand nombre d’espèces qui, toutes, à l’exception du Figuier commun, indigène au midi de l’Europe, ne se trouvent que dans les contrées chaudes de l’Asie, de l’Afrique, de l’Amérique et de la Nouvelle-Hollande. Dans les climats à température élevée, les Figuiers sont cultivés à tige ; mais on les tient en buisson dans les pays où ils ont besoin d’abri pour passer l’hiver.

Le Figuier commun, qui est le type des nombreuses variétés qui sont nées depuis une longue suite de siècles, et qui pullulent en masse dans la seule Provence, forme dans le midi de l’Europe et de la France, un arbre élevé de 5 à 6 mètres, ayant un tronc de 2 mètres de tour et formant une tête arrondie. En Belgique, il acquiert à peine 2 à 3 mètres d’élévation.

Cet arbrisseau est peu difficile sur la nature du sol. Cependant, il se plaît mieux dans une terre légère, sablonneuse et chaude. Chez nous, on ne peut le cultiver, avec quelque chance de succès, que contre un mur, à l’exposition du midi.

Dans les pays chauds, c’est par le pincement et le bourgeonnement qu’on l’élève à tige, et quand sa tête est formée, il suffit de le débarrasser, chaque année, du bois mort ; on laisse la végétation se développer. Il supporte mal la taille ; chaque amputation lui fait perdre une quantité de séve ; ce qui l’appauvrit. Outre le bois mort dont on le débarrasse à chaque printemps, on supprime aussi les branches stériles ; mais on a soin de laisser un long onglet entre la coupe et l’œil qui doit devenir terminal, afin que la mortalité, qui descend, ne puisse pas l’atteindre. Le même motif s’oppose à ce qu’on rabatte une branche rez de celle qui la porte ou rez de la tige. On ébourgeonne les bourgeons surabondants ou nuisibles, et on laisse quelques-uns de ceux qui se forment sur la souche, pour remplir les branches qui meurent ou qui s’épuisent.

Quand les fruits sont formés, il est nécessaire de pincer, à trois ou quatre feuilles, le bourgeon qui les surmonte. Cette opération assure leur tenue et prépare même une seconde récolte, qui toutefois est rare dans les pays où les Figuiers ont besoin d’abri.

Deux moyens sont employés pour faire passer l’hiver aux Figuiers. On rassemble toutes les tiges que l’on maintient par des liens ; puis on les empaille. Ensuite, on butte leur pied en amoncelant, autour de lui, de la terre jusqu’à une hauteur de 50 centimètres. Au printemps, on les découvre peu à peu, en commençant par le pied, et n’enlevant qu’en dernier lieu la paille qui coiffe le sommet. Le second moyen, qui est employé dans nos cultures, consiste à creuser en terre des rigoles de 15 à 20 centimètres de profondeur, dans lesquelles ou couche, avec soin, toutes les tiges, qu’on assujettit avec des piquets en bois. Ensuite, on les couvre de terre sèche, d’une épaisseur de 25 à 30 centimètres disposée en dos d’âne, et dont on bat la surface pour en éloigner l’eau pluviale. Quand le froid devient intense, on couvre le tout d’une couche épaisse de longue litière. Dès que le temps est adouci, on découvre, on redresse les tiges qu’on rétablit autant que possible dans leur état primitif, et l’on ampute, jusque sur la souche, les tiges atteintes par la gelée. Cette suppression fait surgir des bourgeons qui servent à les remplacer et donner du fruit deux ans après.

On multiplie le Figuier par les rejetons qu’on détache des vieux pieds ; c’est le moyen le plus employé. On peut encore le multiplier de semis ; mais ce procédé est lent et puis la qualité des produits est incertaine. Il vaut mieux employer le moyen des marcottes et des boutures faites en avril avec du bois de deux ans. Enfin, on peut avoir recours à la greffe en fente et en couronne, mais on en fait rarement usage.

Les Figuiers donnent généralement deux récoltes : la première se compose de fruits plus beaux ; mais la seconde les produit plus savoureux et plus délicats dans les pays plus méridionaux que la Belgique.

Le suc propre des figues a des propriétés caustiques qui pourraient amener l’empoisonnement. On ne doit pas manger des figues fraîchement cueillies tant que la rosée n’a pas été évaporée par le soleil, car on s’exposerait à avoir les lèvres et les parois internes de la bouche subitement enflées.

Les figues sont béchiques, pectorales et adoucissantes. Leur pulpe est un émollient Ires-salutaire sur les tumeurs enflammées ; elle entre dans la composition de presque tous les gargarismes résolutifs.

Les figues fraîches sont agréables, mais peu nourrissantes ; sèches, elles nourrissent mieux.

Dans le midi de l’Europe, on fait un commerce important de figues, que l’on a fait sécher au soleil ou à la chaleur tiède d’un four, lorsque le temps ne permet pas d’employer le premier moyen.

Les athlètes de l’ancienne Grèce se nourrissaient presque exclusivement de figues sèches, qu’ils considéraient comme propres à entretenir et à augmenter leurs forces. De nos jours, elles sont encore la base de la nourriture des indigents de la Grèce, de la Morée et de l’Archipel. Dans cette dernière contrée, on en fait du vin, du vinaigre et de l’eau-de-vie.

Les Romains qui, sous la république, ne connaissaient que six variétés de figues, en possédaient une trentaine vers la fin de l’empire. C’est à ce fruit que les historiens rapportent la cause de la troisième guerre punique et de la guerre qu’Alexandre déclara aux Athéniens, vers le milieu du ive siècle, avant l’ère chrétienne.

Le Figuier était consacré à Saturne et à Mercure. Pline accordait aux figues de nombreuses propriétés que les modernes n’ont pas reconnues.