Annales de mathématiques pures et appliquées/Tome 13/Analise élémentaire, article 2

ANALISE ALGÉBRIQUE.

Résolution de l’équation générale du quatrième degré ;


Par M. Gergonne.
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On a singulièrement multiplié les méthodes de résolution des équations du troisième et du quatrième degrés, et le plus souvent sans qu’on puisse supposer d’autre but aux auteurs de ces méthodes que celui de faire autrement que leurs devanciers. En voici encore une, particulière au quatrième degré, qui nous paraît n’être pas connue, et qui, outre qu’elle est fort simple, et qu’elle n’est point dépourvue d’une certaine élégance, est du petit nombre de celles qui montrent bien à quoi se réduit finalement la difficulté du problème de la résolution générale des équations.

Soit l’équation générale du quatrième degré, sans second terme,

(1)

dont les racines inconnues soient représentées par de manière qu’on ait

Formons une équation du troisième degré dont les racines soient

en désignant par l’inconnue de cette équation, elle sera

ou bien

ou en développant et ayant égard aux relations (2)

[1] (4)

Lorsqu’on sait résoudre les équations du troisième degré, on peut regarder comme connue les trois racines de l’équation (4). Représentons-les par nous aurons

équations qui, en y joignant une quelconque des équations (2), devront donner les valeurs des racines inconnues

D’abord, en prenant leur somme, on a

(6)

prenant ensuite leurs sommes deux à deux et ayant égard à l’équation (6), il vient, en vertu de la première des équations (2),

ce qui donne

En prenant le produit des équations de la première ligne, il vient

il faudra donc choisir les signes des radicaux de cette première ligne de telle sorte que leur produit soit de signe contraire à Prenant ensuite la somme de ces mêmes équations, on aura

de sorte que si est positif dans l’équation, on aura

tandis que si, au contraire, est négatif dans l’équation, ses quatre racines seront

Nous avons pu ramener la résolution de l’équation du quatrième degré à celle d’une équation du troisième, parce qu’il existe une fonction non symétrique de quatre quantités qui, par les diverses permutations qu’on y peut faire des lettres les unes avec les autres, n’est susceptible que de trois formes différentes seulement ; et on aurait pu également parvenir au but en employant des fonctions de la forme qui jouissent de la même propriété.

Le problème général de la résolution des équations de tous les degrés tiendrait donc, d’après cela, à trouver, pour chaque degré une fonction non symétrique de lettres qui, par les diverses permutations qu’on y pourrait faire de ces lettres entre elles, ne prendrait qu’un nombre de formes différentes inférieur à et il ne paraît guère que ce problème soit possible, lorsque le nombre est plus grand que quatre.

  1. En effet, d’abord le coefficient du second terme de l’équation (3) est immédiatement égal à le développement de celui du troisième retient à

    qui se réduit à enfin le dernier terme peut être écrit ainsi :

    qui revient à

    On pourrait, au surplus, parvenir encore à l’équation (4), quoique par un calcul moins symétrique, en éliminant entre les équations (2) et la suivante :