Amours et Haines (1869)/Décembre
DÉCEMBRE
Voici décembre en deuil sous son crêpe de givre,
Voici l’ombre et la nuit, ces deux vivantes morts :
Le passant qui se hâte entend comme un remords
La mendicité blême en suppliant le suivre.
Voici décembre en fête et les grelots de cuivre
Du carnaval sans frein, comme un cheval sans mors,
Voici les folles nuits et l’heure où tu nous mords,
Ô rage d’oublier que nous appelons vivre !
Le soleil est avare et les pauvres sont nus.
Ils ont fui, les longs jours qui sont autant de trêves.
Les champs n’ont plus de fleurs, l’esprit n’a plus de rêves.
Cependant, aux tiédeurs de souffles inconnus,
S’ouvrent discrètement dans l’âme et dans la mousse
La douce violette et la charité douce.