Imprimeries Réunies. S. A. (p. 13-14).

Dialogue vaudois

— Et alors ! Quoi de nouveau ?

— Ah ! là, voilà. Pas grand’chose. On n’est pas tant de bonne humeur.

— Et pourquoi ?

— La guerre… l’avenir… tout, quoi. À la maison tout le monde marronne. La mère s’inquiète, les fils s’agitent… chez toi, ce n’est pas de même ?

— Eh bien, non.

— Je m’étonne pourquoi.

— Je vais te dire. Les fils sont comme ils disent des « sportifs ». Ils sont toujours gais et allants ; ils prennent tout à la bonne. Quand ils reviennent du lac ou de leur gymnastique, ils sont tout fous de joie. Ils dorment que douze locomotives sous pression ne les réveilleraient seulement pas. Tout ce qu’on leur donne pour manger, ils le trouvent d’extra, et les petits embêtements de la vie, pour eux, c’est de la plaisanterie. Et avec ça ils abattent leur besogne rudement bien.

— Ah alors, ça je n’en crois rien.

— Et pourquoi que tu ne le crois pas ?

— Parce que le travail, c’est le travail. Quand on s’est bien fatigué à la gymnastique, on ne peut plus être bon au travail, puisque la gymnastique c’est du travail et un travail de sorte.

— Eh bien, je l’ai cru comme toi, mais j’ai vu que je me trompais. Ce n’est pas le même travail et pas la même fatigue. Y a pas à dire, la gymnastique, ça repose. Et puis, il faut voir comme ça développe ces gaillards. On en voit de ces crazets tout crottus, tout de bizingue qui se redressent, qui se renforcent ; c’est pas croyable. Et au moral comme au physique.

— Et c’est vrai, ça ?

— Comme je te le dis.

— Eh bien, je veux voir essayer avec mes garçons aussi.