Abrégé de l’histoire générale des voyages/Tome XVII/Troisième partie/Livre VIII/Chapitre VII

CHAPITRE VII.

Îles espagnoles.

Nous avons vu dans le premier livre de cette partie l’histoire de la découverte et de l’établissement des principales îles espagnoles. Jetons un coup d’œil sur leur état actuel, en commençant par les plus méridionales, et allant ensuite du sud au nord.

Nous avons parlé de la Marguerite dans la description de Caracas. L’Espagne possède encore sur la côte de ce pays les petites îles de la Orchila, la Blanca ou la Blanquilla, où paissent des bœufs sauvages ; Cubagua, jadis fameuse par sa pêcherie de perles, la Salsa Tortugua, qui a beaucoup de salines ; Coche, rendez-vous de pêcheurs.

Porto-Rico, une des grandes Antilles, est située entre les 17° 54′ et les 18° 30′ nord, et les 67° 50′ et les 69° 28′ à l’ouest de Paris. Sa forme est à peu près celle d’un parallélogramme. L’intérieur est traversé par une chaîne de montagnes qui se prolongent de l’est à l’ouest, renferment de belles vallées, et où l’air est très-salutaire. Il est au contraire malsain pendant la saison pluvieuse dans quelques endroits des plaines basses. Le sol, généralement fertile et profond, est arrosé par plusieurs belles rivières. La population s’est beaucoup accrue depuis vingt-cinq ans par les malheurs de Saint-Domingue. On y compte à présent 140,000 habitans, dont 18,000 esclaves. Le gouvernement espagnol accorde des encouragemens aux colons qui viennent s’y établir, quand ils sont de la religion catholique romaine. Les restrictions auxquelles le commerce était soumis autrefois donnaient lieu à une contrebande considérable ; il a été rendu libre moyennant des droits modérés.

San-Juan de Puerto-Rico, la capitale, est bâtie sur une petite île jointe à la côte septentrionale par une longue chaussée. Son port est excellent : elle a 8,000 habitans. L’île a d’autres bons ports et plusieurs villes. Elle exporte du sucre, du café, du coton, du riz, du maïs, des cuirs, du bois de construction, etc., enfin des mulets et du bétail. On ne s’occupe plus des mines d’or, qui engagèrent les Espagnols à s’y établir.

La partie espagnole de Saint-Domingue avait été cédée à la France en 1795 ; elle retourna sous le pouvoir de ses anciens maîtres en 1814. Elle renferme 104,000 habitans, sur lesquels il y a 10,000 hommes de couleur libres, et seulement 30,000 nègres esclaves. Des forêts immenses couvrent les montagnes ; la coupe des bois, l’entretien des bestiaux, quelques plantations de cacao et un petit nombre de sucreries occupent la population, qui n’a jamais été très-industrieuse. En ce moment elle vit assez amicalement avec le royaume et la république nègres qu’elle a dans son voisinage.

San-Domingo, la plus ancienne ville européenne d’Amérique, est sur la rivière Ozama. On assure que les ossemens de Christophe Colomb reposent dans l’église cathédrale. Cette ville, bien déchue de son ancienne splendeur, compte 25,000 habitans.

Cuba, la plus grande des Antilles, s’étend du 20 au 23° 15′ de latitude nord, et du 76 au 88° de longitude à l’ouest de Paris. Elle a deux cent quatre-vingts lieues de longueur sur une largeur qui varie de vingt à cinquante. Elle est traversée de l’est à l’ouest par une chaîne de montagnes ; mais les terres, près de la mer, sont en général basses et inondées dans la saison pluvieuse. Son sol passe pour le plus fertile des Antilles. La culture y a fait des progrès étonnans depuis les désastres de la partie française de Saint-Domingue. On y compte près de 500,000 habitans. Le climat est chaud et sec, plus tempéré que celui de Saint-Domingue. Cuba exporte du sucre, du coton, du café, du cacao, du tabac, qui est le plus renommé de l’Amérique, des cuirs ; toutes les denrées nécessaires à la vie y abondent. Les abeilles y ont été introduites par un habitant de la Floride, vers le milieu du dix-huitième siècle ; aujourd’hui le commerce du miel et de la cire est considérable. On trouve dans cette île beaucoup d’eaux chaudes minérales ; ses salines sont productives. On a découvert depuis peu de temps, près de la Havane, une mine de fer de bonne qualité. Jadis Cuba fut renommée pour ses mines d’or ; on dit qu’il s’y trouve des mines de cuivre, d’argent et de pierres précieuses. Les richesses de son agriculture sont plus réelles.

La Havane, capitale, située sur la côte septentrionale de l’île, a le meilleur port de l’Amérique ; il peut contenir mille vaisseaux. L’entrée étroite et difficile est défendue par plusieurs forts. Cette ville est l’entrepôt d’un commerce immense. On porte sa population à 70,000 habitans.

Les autres villes sont Puerto-del-Principe, vers le milieu de l’île, avec 30,000 habitans ; San-Iago de Cuba, au fond d’une belle baie, sur la côte sud, a un évêché et 20,000 habitans ; Guanavacoa, San-Carlos de Matanzas, Halquin et Buyamo.