Abrégé de l’histoire générale des voyages/Tome XVII/Troisième partie/Livre VIII/Chapitre VI

CHAPITRE VI.

Îles hollandaises, danoises, suédoise.

Les Hollandais possèdent dans les Antilles les îles de Saint-Eustache et Saba, avec une partie de Saint-Martin, et sur la côte de Caracas, Curaçao, Bonair et Aruba.

Saint-Eustache n’a que deux lieues de long sur une de large. Cette île, située à trois lieues au nord-ouest de Saint-Christophe, est formée de deux montagnes séparées par un vallon très-resserré. Le sommet oriental présente un ancien cratère de volcan. C’est sur les flancs des montagnes que les cultures sont établies. L’île, dépourvue de port et bordée de rochers, n’a qu’une seule rade, et est très-bien fortifiée ; quoiqu’elle manque de sources, on y cultive du tabac et un peu de sucre, et on en exporte du bétail, du maïs et diverses provisions. On y compte 3,000 blancs et 1,500 nègres.

Saba, rocher de quatre lieues de tour au nord-ouest de Saint-Eustache, est entouré de hauts-fonds qui ne permettent qu’aux chaloupes d’en approcher. Après avoir débarqué sur la plage, il faut gravir le rocher par un chemin très-raide et bordé de précipices. Au sommet s’étend une plaine bien cultivée en indigo et en denrées comestibles. Les habitans fabriquent du fil d’agave, des bas de coton et des souliers. La population est de 300 hommes libres et 150 esclaves.

Nous avons vu précédemment quelles étaient les productions de Saint-Martin. Ses côtes sont coupées de baies et d’étangs. Elle renferme 4,100 habitans.

Curaçao, une des îles sous le vent, est à seize lieues au nord du cap Romaio, sur la côte de Caracas. Sa longueur est de vingt lieues du sud-est au nord-ouest ; sa largeur moyenne de quatre. Elle est extrêmement aride, n’ayant qu’un seul puits, et dépend des pluies pour que ses citernes puissent s’emplir d’eau. L’industrie des Hollandais l’a rendue féconde en sucre, tabac, coton, manioc, maïs. Ils y récoltent aussi beaucoup de sel, dont ils approvisionnent les îles anglaises et le continent espagnol. La population de l’île se compose de 2,800 blancs, 4,200 hommes de couleur libres et 5,400 nègres esclaves. Willemstadt, la capitale, est une belle ville ; les rues sont propres et bien alignées, les maisons construites avec soin et commodément distribuées. Les magasins sont vastes et bien fournis. Curaçao fait avec le continent espagnol un grand commerce de marchandises d’Europe. C’est le rendez-vous général de la navigation de ces mers.

Bonair et Aruba, petites îles voisines, sont entièrement employées en pâturages. On fait aussi du sel dans la première, et l’on tire du bois de charpente de la seconde.

Les petites îles de Sainte-Croix, Saint-Thomas et Saint-Jean dans l’archipel des Vierges, appartiennent aux Danois. La première, qui a dix lieues de long sur trois de largeur, a successivement passé des Espagnols aux Anglais et de ceux-ci aux Hollandais. Elle fut achetée en 1651 pour les chevaliers de Malte ; ils la vendirent en 1684 à la compagnie française des Indes occidentales, qui la céda au Danemarck en 1696. Elle est un peu montueuse, très-fertile, et très-bien cultivée. Elle produit de très-bon sucre, et du coton ; sa population est de 2,200 blancs, 1,200 hommes de couleur libres, et 28,000 nègres esclaves. La capitale est Christianstadt, près de la pointe orientale de l’île.

Saint-Thomas a trois lieues de long sur une de largeur. Elle est aride, et en grande partie montueuse. Son port est sûr, spacieux et commode ; de vastes magasins y reçoivent les marchandises de l’Europe et de l’Amérique ; car, quoique cette île produise du sucre et du coton, son principal commerce consiste dans l’entrepôt des marchandises que l’on y apporte de toutes parts. On y compte 5,000 nègres esclaves, 1,500 nègres libres, et 500 blancs de diverses nations.

Le sol de la petite île de Saint-Jean est montueux, mais bon et bien arrosé ; cependant la culture en sucre et en coton y est encore peu avancée.

Saint-Barthélemi, qui n’a que huit lieues de tour, fut cédée par la France à la Suède en 1784. Depuis cette époque, elle a singulièrement prospéré ; sa position facilite le commerce interlope. Quoique montagneuse, elle est dépourvue d’eau. Elle est peuplée de 5,500 nègres esclaves et 2,500 blancs. On y récolte principalement du coton. Gustavia, sa seule ville, est bâtie sur le bord du carénage, où le mouillage est bon, mais qui n’a que deux brasses de profondeur. Cette île est sujette aux ravages des ouragans.