Œuvres complètes de Saint-Just/Tome 1/VI. Lettre à Garot

Lettre à Garot, Texte établi par Charles Vellay, Eugène Fasquelle, éditeur (L’Élite de la Révolution)Tome premier (p. 230-231).


VI

LETTRE À GAROT


Vers la même époque, et relativement à la même affaire, Saint-Just écrivit cette lettre à M. Garot, notaire royal au bailliage de Coucy. Le notaire Garot était un ami de la famille de Saint-Just, avec laquelle il entretenait de fréquentes relations. Les termes mêmes des diverses lettres que lui écrivit Saint-Just montrent la cordialité de leurs rapports.

Octobre 1790.

Monsieur et ami,

Je suis arrivé à très bon port et très attendu. J’ai remporté victoire sur ce que vous savez, j’avais affaire à partie de bonne foi. Je ne vous fais point ici de longs remerciements des honnêtetés dont vous m’avez comblé. Mais vous et Madame ne pourrez pas l’aire de plus grand plaisir à la famille que de venir la visiter le plus tôt que vous pourrez.

On vous remettra avec la présente une sentence et une signification de M. Dufour. Avisez au moyen de retarder, mitiger ou annuler, s’il est possible, cette procédure. Je conviens que cela serait difficile. Tout est solide pour le fond si l’on en croit le substitut du procureur du Roi, qui a vu les titres du seigneur de [Grenet] ; quant aux frais, je ne les crois pas tout à fait superflus, pour le temps.

Un décret de l’Assemblée nationale, et plusieurs même, en anéantissant certaines procédures pour le fond, ajoutent qu’elles seront poursuivies seulement pour les frais. Ainsi je ne trouve pas grand chose en faveur de cette partie, sinon de traduire la cause au tribunal nouveau.

Vous ferez ce que vous aviserez bon, et présentez mon très humble respect à Mme Garot, et embrassez-la pour moi. Ne perdez pas de vue votre affaire du greffe, car le décret exclut absolument M. Lefèvre, je l’ai vérifié en arrêt. Voyez M. Carlier, M. Deltreux-Pornent, etc., s’il le faut, car le choix dépend d’eux à peu près. Mes compliments à M. Haulain.

J’ai l’honneur d’être avec un sincère et éternel attachement votre très humble et obéissant serviteur.

Saint-Just.


P.-S. — Cette communication de titres de concession mérite examen. Ce n’est pas (j’y pense) de cette manière qu’on donne communication d’un titre. Au surplus, il s’agit de possession par triage ; les triages sont abolis depuis trente ans et à jamais. Accrochez le fond au tribunal, il entraînera les frais puisque la perte sur le fond entrainera le reste dans le cas où la communication de titres de concession serait illusoire.


À Monsieur, Monsieur Garot, notaire royal et professeur au Bailliage de Couci, à Couci.